Henri Maspero (1883-1945)

Couverture de : Henri MASPERO (1883-1945), La vie privée en Chine à l'époque des Han. Conférence faite au musée Guimet, le 29 mars 1931. Revue des Arts Asiatiques, Paris, 1932, tome VII, pages 185-201.

LA VIE PRIVÉE EN CHINE À L'ÉPOQUE DES HAN

Conférence faite au musée Guimet, le 29 mars 1931.
Parution dans la Revue des Arts Asiatiques, Paris, 1932, tome VII, pages 185-201.

  • "Je voudrais montrer comment vivait un Chinois des quelques siècles qui précédèrent et suivirent immédiatement l'ère chrétienne, comment il se logeait, comment il s'habillait, comment il se nourrissait, comment il se faisait servir, etc. "
  • "Nous sommes beaucoup moins bien renseignés sur la vie privée des Chinois du temps des Han que sur celle de leurs contemporains grecs et romains, mais grâce aux fouilles de ces dernières années, nous commençons à nous en faire quelque idée. Les archéologues japonais en Corée et en Mandchourie, et l'École Française d'Extrême-Orient au Tonkin, ont fouillé scientifiquement et méthodiquement quelques tombes de cette époque ; les grandes explorations d'Asie Centrale ont apporté à leur tour des objets d'origine plus variée, mais souvent chinois. Il faut y ajouter les trouvailles des marchands d'antiquités en Chine même, qui sont venues enrichir les grandes collections publiques et privées d'Europe, d'Amérique et du Japon : elles viennent assez souvent se ranger exactement dans les séries archéologiques pour qu'on puisse en tirer parti, en dépit de quelque obscurité sur les circonstances et les lieux de leur découverte."
  • "Il serait fastidieux de passer en revue les objets que les fouilles nous ont fournis ; aussi me paraît-il préférable de ne pas présenter les choses de cette façon. Je supposerai un Chinois riche (il n'y a que les riches sur qui nous soyons renseignés), un fonctionnaire de la cour au milieu du IIe siècle de notre ère, chez lui, dans sa maison, et je m'efforcerai de vous le montrer vivre pendant quelques heures."


Extraits : Le matin approche... - Appartements intérieurs et toilette féminine - Cuisines et banquets
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Le matin approche...

Le matin approche, mais naturellement personne dans la maison ne saurait dire l'heure : le soleil n'étant pas encore levé, il est trop tôt pour consulter le cadran solaire de la cour ; quant aux grandes horloges à eau comme il y en a au palais, ce sont, avec leurs trois récipients disposés en escalier, des instruments trop encombrants, trop compliqués et beaucoup trop difficiles à faire établir pour qu'un simple particulier puisse en posséder une. Heureusement le chant du coq suffit à réveiller le maître ou tout au moins les serviteurs. À peine éveillé, notre homme se lève aussitôt, car son lit est trop dur pour prêter à la flânerie. L'habitude est d'être prêt au lever du soleil. Les domestiques allument les lampes : une grande lampe à neuf branches éclaire toute la pièce (ci-dessous, c). Mais il y a d'autres lampes d'aspect plus artistique : en voici une dont le pied est fait d'un petit personnage monté sur un dragon (ci-dessous, d). Et s'il est nécessaire d'aller chercher quelque objet au dehors ou dans un coin mal éclairé, on peut se servir de lampes portatives : certaines, en bronze, ont la forme allongée des coupes à vin, avec leurs deux petites anses latérales plates ; une moitié du couvercle s'ouvre en tournant autour d'une charnière et se rabat de façon que le creux en soit en haut ; c'est lui qui sert de lampe, c'est là qu'on met la mèche, le trop-plein d'huile se déverse dans la coupe qui est dessous (ci-dessous, e).

Lampes. Henri Maspero (1883-1945) : La vie privée en Chine à l'époque des Han. — Conférence au musée Guimet, le 29 mars 1931. Parution dans la Revue des Arts Asiatiques, Paris, 1932, tome VII, pages 185-201.
c. Grande lampe à neuf becs. — d. Lampe. — e. Lampe portative ouverte.


La toilette est vite faite. Au réveil il se lave les mains et se rince la bouche, puis il se coiffe. Dans la première moitié du IIe siècle av. C., les courtisans de l'empereur Houei (194-188) se blanchissaient et se fardaient le visage chaque jour. mais il ne semble pas qu'ils se le soient lavé régulièrement. Le Code des Han imposait à tous les fonctionnaires le devoir de se laver les cheveux et le corps une fois tous les cinq jours ; ce jour-là était un jour de congé général, où les administrations vaquaient. La raison de ce congé était qu'on ne pouvait mettre le bonnet official pendant qu'on laissait sécher ses cheveux défaits et tombant sur les épaules.
Aujourd'hui n'étant pas jour de bain, notre personnage ne fait que de brèves ablutions et s'habille.

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Appartements intérieurs et toilette féminine

Objets de toilette féminins. Henri Maspero (1883-1945) : La vie privée en Chine à l'époque des Han. — Conférence au musée Guimet, le 29 mars 1931. Parution dans la Revue des Arts Asiatiques, Paris, 1932, tome VII, pages 185-201.
Planche LVIII. — a. La toilette d'une femme. — b. Coffret à toilette laqué. — d. Le même, vue intérieure. — c. Houppette à poudre en poil d'animal. — e. Peignes gros et fin. — f. Épingle à cheveux. — g. Aiguille en bois pour peindre les sourcils.
Une chambre. Henri Maspero (1883-1945) : La vie privée en Chine à l'époque des Han. — Conférence au musée Guimet, le 29 mars 1931. Parution dans la Revue des Arts Asiatiques, Paris, 1932, tome VII, 17 pages.
La reine Maya dormant dans sa chambre

Pendant ce temps, les appartements intérieurs se sont peu à peu éveillés. Puisque notre Chinois est fort riche, il a nécessairement un grand nombre de femmes, ce qui tient d'autant plus de place que chacune d'elles a pour la nuit une chambre particulière. C'est un tout petit cabinet que le lit occupe en entier. Les dessins de l'époque des Han en figurent un, mais de façon si schématique que, pour mieux le faire comprendre, il faut d'abord le montrer tel qu'un peintre du IXe siècle le représente. C'est un tableau religieux : la reine, la future mère du Buddha, dort et le Bodhisattva descend sous la forme d'un éléphant. Mais bien que la scène se passe dans l'Inde, c'est un palais chinois (ci-contre, b). On peut voir la minuscule pièce que remplit l'estrade où dort la reine.

Chambre à coucher. Henri Maspero (1883-1945) : La vie privée en Chine à l'époque des Han. — Conférence au musée Guimet, le 29 mars 1931. Parution dans la Revue des Arts Asiatiques, Paris, 1932, tome VII, pages 185-201.
Chambre à coucher (rouleau de Kou K'ai-tche, British Museum)


Une autre peinture plus ancienne (elle vient du rouleau attribué à Kou K'ai-tche qui est actuellement au British Museum) montre elle aussi une pièce très petite, et que le lit remplit toute.

L'assassinat de la femme vertueuse. Henri Maspero (1883-1945) : La vie privée en Chine à l'époque des Han. — Conférence au musée Guimet, le 29 mars 1931. Parution dans la Revue des Arts Asiatiques, Paris, 1932, tome VII, pages 185-201.
L'assassinat de la femme vertueuse de la capitale

C'est une pièce analogue que représente schématiquement un dessin d'une pierre gravée du IIe siècle. C'est l'histoire de la femme vertueuse de la capitale. Son mari, qui avait un ennemi mortel, changeait chaque nuit de chambre pour dormir. L'ennemi menaça la femme de tuer son père si elle ne lui révélait le lieu où son mari passerait la nuit suivante. Prise ainsi entre deux devoirs, elle désigna une chambre à l'assassin, puis, la nuit venue, elle s'y coucha elle-même et se fit tuer par l'ennemi qui la prit pour son mari. Le petit pavillon où elle dort est représenté par deux colonnes et un toit. À l'intérieur se trouve quelque chose qui ressemble à un lit européen ou chinois moderne, mais est en réalité la couche en bois posée sur une estrade occupant toute la superficie de la pièce comme dans la peinture de Touen-houang ou dans celle de Kou K'ai-tche. L'assassin n'entre pas : il lui faudrait monter sur le lit. C'est dans ces petites chambres que les femmes passent la nuit.

La taille cassée. Henri Maspero (1883-1945) : La vie privée en Chine à l'époque des Han. — Conférence au musée Guimet, le 29 mars 1931. Parution dans la Revue des Arts Asiatiques, Paris, 1932, tome VII, pages 185-201.
Femme en costume long, démarche "à la taille cassée"

Je n'ai pas besoin de décrire en détail l'habillement féminin : je vous ai déjà dit que les vêtements des femmes différaient peu de ceux des hommes. Mais souvent elles portaient des couleurs vives : dans une peinture sur laque représentant la déesse Si-wang-mou et une servante, le corsage est vert clair avec des bordures vert foncé ; la jupe est jaune semée de points rouges. En été, au sixième mois qui est le temps des plus fortes chaleurs, il est élégant de porter, comme les femmes du palais, une tunique droite sans manches, de couleur pourpre, sans broderie ni application de fleurs. De la toilette, le rouleau attribué à Kou K'ai-tche offre un charmant tableau. Vous savez qu'on a trouvé à Lolang, en Corée, dans un tombeau de femme, tout le matériel de toilette : boîte à poudre, boîte à fard, pinces, spatules, miroir (pl. LVIII). Une boîte de laque contenait le miroir et il y avait un grand plateau de laque pour disposer les divers ustensiles pour la toilette. La Chinoise de ce temps se blanchissait non seulement le visage, mais encore le dos et les épaules [Sur le poudrage des épaules, voir Ts'ien-han chou : Tchao-siu (la favorite du roi de Kouang-tch'ouan) accuse Wang-k'ing (sa rivale) : « Précédemment quand les peintres peignaient l'appartement de Wang-k'ing, elle ouvrait sa robe de dessus et sa robe de dessous et se poudrait devant eux. » (Commentaire : ouvrir sa robe de dessus et sa robe de dessous, c'est ôter ses vêtements et montrer son dos et ses épaules.)] ; elle se servait pour cela soit de poudre de riz, soit de « poudre barbare ». c'est-à-dire de céruse, en ayant soin d'essuyer légèrement la poudre au-dessous des yeux pour se faire la « parure de larmes ». Sur ce fond de teint, elle étalait des taches de rouge minéral de cinabre ou encore de rouge végétal de carthame ; pour finir, elle posait sur les joues des mouches, points noirs dont la place variait suivant la mode. De plus, elle se faisait raser les sourcils qu'elle remplaçait par une ligne bleue de cobalt un peu plus haut sur le front ; la forme et la place de ces faux sourcils variaient suivant la mode : au milieu du Ier siècle avant notre ère, sous l'empereur Wen-ti, il était de bon ton de se dessiner des sourcils en forme d'accent circonflexe ; au milieu du IIe siècle de notre ère, la mode était aux sourcils déliés de forme arquée qu'on appelait « les sourcils de tristesse » ; un peu plus tard on préféra les sourcils larges et épais ; l'exemple de l'impératrice Ming-tö dans la deuxième moitié du Ier siècle p. C., qui, ayant les sourcils naturellement fort bien dessinés, les conserva, se contentant de compléter avec du noir une pointe insuffisante du côté gauche, n'avait pas suffi à faire abandonner cette mode. Voulez-vous savoir comment on décrit une jolie femme à la mode au IIe siècle ?

« Souen Cheou avait un beau teint, et excellait à se faire un visage agréable ; elle se faisait des sourcils de tristesse, la parure de larmes, un chignon en cheval qui tombe (de travers et pendant d'un côté) ; elle tenait la bouche comme une personne qui a mal aux dents (avec un rictus qui découvre les dents, sans avoir l'air gai) ; elle avait la démarche à la taille cassée »
(c'est-à-dire probablement le ventre en avant, comme on voit tant de statuettes féminines antérieures aux T'ang).

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Cuisines et banquets

Planche LX. — a. Puits et cuisine. — b. c.  Fourneau de cuisine avec préparatifs de repas. — d. Plateau pour servir le repas. — e. Cuisinier écaillant un poisson. — f. Coupe à vin laquée vue de côté et de dessus. — g. Musicien. — h. i. Danseurs.
Planche LX. — a. Puits et cuisine. — b. c. Fourneau de cuisine avec préparatifs de repas. — d. Plateau pour servir le repas. — e. Cuisinier écaillant un poisson. — f. Coupe à vin laquée vue de côté et de dessus. — g. Musicien. — h. i. Danseurs.

Descendons dans la cuisine, voir préparer le repas. La cuisine est dans les communs ; dans les palais où il y a une salle de banquet particulière, elle est souvent dans le sous-sol de cette salle ; il n'y a que dans les maisons des pauvres gens qu'elle est dans le même corps de bâtiment que la grande salle, que son fourneau chauffe et enfume tout à la fois. Notre personnage, quand il a fait construire sa maison, a mis la cuisine assez loin pour n'en être pas incommodé ; d'autre part, suivant l'usage ordinaire, il l'a mise près du puits.

Cuisine. Henri Maspero (1883-1945) : La vie privée en Chine à l'époque des Han. — Conférence au musée Guimet, le 29 mars 1931. Parution dans la Revue des Arts Asiatiques, Paris, 1932, tome VII, pages 185-201.
Une cuisine. (Estampage Musée de l'Univ. Imp. de Tôkyô.)

Un grand fourneau à deux trous occupe tout le fond de la cuisine : en avant, sur le plus grand de ces trous, une énorme bouilloire toujours remplie d'eau ; derrière, un trou moins grand sur lequel on met des pots pour préparer diverses sortes de mets ; le fourneau se charge en avant par une ouverture carrée, et un esclave particulier a pour besogne de recharger le foyer et de souffler de l'air avec une longue canne creuse (pl. LX, b, c). Une foule d'esclaves s'empresse autour de la cuisine. En voici deux qui vont chercher de l'eau au puits, une perche à contrepoids leur permet de tirer l'eau sans effort ; mais il y a dans d'autres maisons des puits plus simples où l'on tire l'eau par un seau au bout d'une corde sans contrepoids. Le couteau à la main, un boucher s'approche d'un porc ligoté qu'il va égorger et dépecer. Cet autre pousse un mouton. Un cuisinier agenouillé devant une petite table est en train d'écailler un poisson. Quelques domestiques lavent la vaisselle (pl. LX, e).

Dans un coin sont suspendues à des crocs toutes sortes de victuailles : un jambon, une chèvre ouverte dans toute sa longueur et aplatie, un canard ouvert de la même façon, des poissons. L'heure du repas approche, des esclaves lavent les plats et les bols, et se préparent à servir. Les mets sont mis tout découpés sur des plats et des assiettes disposés sur de petites tables avec ou sans pieds qu'on pose à terre devant les convives. Voici des esclaves qui montent les plats par l'escalier très raide. En voici d'autres qui servent un très haut personnage et lui présentent un bol qu'ils se passent de main en main.

Escalier de cuisine. Henri Maspero (1883-1945) : La vie privée en Chine à l'époque des Han. — Conférence au musée Guimet, le 29 mars 1931. Parution dans la Revue des Arts Asiatiques, Paris, 1932, tome VII, pages 185-201.
Des serviteurs montent les plats par l'escalier très raide. (Estampage Éd. Chavannes.)

Que mangeaient les Chinois de ce temps ? Leur cuisine était aussi éloignée de la cuisine chinoise moderne que celle des Grecs ou des Romains peut l'avoir été de la nôtre. La seule chose qui n'ait pas changé est l'amour de l'échalote et de l'oignon. Le porc était sûrement, en ce temps comme aujourd'hui, la viande la plus ordinairement servie aux repas des riches comme des pauvres (mais ceux-ci n'en devaient pas manger souvent) ; les conserves et les hachis paraissent avoir été aussi de consommation courante. On accompagnait la viande de millet ou de sorgho, ou encore de riz, mais le riz n'avait pas encore pris la prééminence qu'il a de nos jours. De l'eau, quelques liqueurs fermentées analogues à celles qu'on boit encore aujourd'hui, servaient de boisson. Les infusions de thé étaient encore inconnues des Chinois : c'était une boisson des sauvages du midi du fleuve Bleu, et la mode ne s'en répandit qu'au cours des siècles suivants. Dans les grandes circonstances, la cuisine devenait plus recherchée. Le Li ki énumère de nombreux plats qu'on mangeait à certains banquets de cérémonie : ils sont plus curieux qu'appétissants. La viande crue coupée en tranches minces y joue un rôle important : tantôt on la fait sécher après l'avoir soit aromatisée au gingembre, soit battue, ou bien on la fait macérer dans du vinaigre assaisonné d'oignon.

Banquet et acrobate. Henri Maspero (1883-1945) : La vie privée en Chine à l'époque des Han. — Conférence au musée Guimet, le 29 mars 1931. Parution dans la Revue des Arts Asiatiques, Paris, 1932, tome VII, pages 185-201.
Banquet avec un acrobate. (Estampage Musée de l'Univ. Imp. de Tôkyô.)

Un grand banquet complet se compose de cinq services : bouillon, bœuf, mouton, porc et poisson, gibier, et chacune des trois viandes est servie préparée de trois façons : rôtie, en hachis et en tranches confîtes dans le vinaigre. Chaque service est accompagné de plats de riz ou d'autres céréales : riz avec le bœuf et le mouton, millet avec le porc, etc. Parmi les mets délicats et recherchés, on cite le hachis d'escargots confits dans du vinaigre, le cochon de lait farci d'oseille, la tortue farcie d'une sorte de vinaigrette de viande hachée, la viande de chien, enfin un plat après lequel je m'arrêterai : des tranches de viande crue aromatisées au gingembre et séchées, assaisonnées d'œufs de fourmis conservés au sel.

Vous ne vous étonnerez pas qu'avec cela il ait été nécessaire de boire beaucoup : on tirait toutes sortes de boissons fermentées du millet, des boissons douces, sucrées, fortes, amères. Mais si nous connaissons à peu près le mode de fabrication de ces diverses liqueurs, nous n'avons aucune idée de leur goût ou de ce qu'elles étaient réellement ; tout ce que nous savons est qu'on se grisait fort bien avec elles, et que l'ivresse était la conclusion habituelle des grands festins.

Musiciens, danseurs, jongleur, acrobates. Henri Maspero (1883-1945) : La vie privée en Chine à l'époque des Han. — Conférence au musée Guimet, le 29 mars 1931. Parution dans la Revue des Arts Asiatiques, Paris, 1932, tome VII, pages 185-201.
Musiciens, danseurs, jongleur, acrobates. (Estampage Éd. Chavannes.)

Ces grands festins d'ailleurs sont rares. En effet, une loi interdit à quiconque de recevoir plus de trois invités à un repas, en dehors des fêtes, sous peine d'une amende de quatre onces d'or. Mais si les occasions sont rares, on ne profite que davantage de celles qui surviennent. Les banquets des jours de fêtes sont de véritables ripailles, où l'on s'empiffre jusqu'à être malade, où on se saoule. On les accompagne de musique et de danse. Parfois ce sont les convives eux-mêmes, qui, égayés par le vin, se mettent à danser : quand en 67 a. C. Hiu Kouang-han, grand-père maternel du prince héritier, inaugura son hôtel à la capitale, au banquet qu'il offrit à tous les hauts fonctionnaires venus le féliciter, l'un d'eux, le ministre du Trésor Privé, mima le combat du singe et du chien, danse burlesque qui fit rire tous les assistants. D'autres fois, l'hôte fait venir des danseurs professionnels, ou même des baladins ; des équilibristes font des tours : l'un se tient sur la tête devant les convives ; un hercule porte une perche où des enfants suspendus par les mains et les pieds font de la voltige ; à côté, un homme jongle avec six balles à la fois ; d'autres dansent en agitant leurs longues manches ; des tambours, des flûtes et divers instruments les accompagnent.

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