BRUCKER Joseph (1845-1926)

CORRESPONDANCE SCIENTIFIQUE

d'un missionnaire français à Péking au dix-huitième siècle, le père Antoine GAUBIL,

d'après des documents inédits

Revue du monde catholique LXXVI, 1883, pages 5-26, 206-227, 365-377, 701-716.

  • "Ceux des écrits [du père Gaubil] qui ont été publiés en Europe lui ont assuré depuis longtemps une place honorable dans l'histoire de l'érudition et des sciences au dix-huitième siècle. Nous ne croyons pas, néanmoins, qu'il soit connu autant qu'il en était digne. Les rares qualités de son esprit, sa prodigieuse activité, les services qu'il a rendus à la science dans plus d'une branche, ne se révèlent pleinement que dans sa vaste correspondance, restée en grande partie inédite."
  • "D'ailleurs, la correspondance de Gaubil n'est pas seulement le reflet du travail d'un homme isolé ; elle nous initie également aux études de ses correspondants, dont plusieurs eurent un rang distingué dans la république des lettres ; on y voit ce que lui doivent quelques-uns d'entre eux qui n'ont pas avoué toutes leurs obligations."
  • "Au moins nous espérons que l'histoire littéraire du dix-huitième siècle gagnera quelque chose aux simples notices où nous allons résumer les lettres échangées entre notre missionnaire et des savants, soit français, tels que le père Étienne Souciet, Jacques Cassini, Dortous de Mairan, Fréret, Joseph de l'Isle, De Guignes, etc., soit étrangers, comme divers membres des Académies de Londres et de Saint-Pétersbourg."

Ne pas oublier aujourd'hui la source de référence : Antoine Gaubil, Correspondance de Pékin, publié par Renée Simon, Droz, 1970 ; mais, sauf erreur, toujours un bien privé, alors que les articles de Joseph Brucker sont un bien commun.


Extraits : Travaux astronomiques - L'ancienne astronomie de la Chine - L'antiquité de la nation chinoise
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Travaux astronomiques

Les instructions qu'on lui avait données en France, aussi bien que la tradition de ses prédécesseurs dans la mission, et ses propres goûts, engageaient Gaubil à s'appliquer avec ardeur aux observations astronomiques. Les premiers jésuites français venus en Chine, notamment le père de Fontaney qui les y avait menés comme chef, avaient laissé de brillants exemples dans ce genre de travaux. L'Histoire et les Mémoires de l'Académie des sciences, à la fin du dix-septième siècle, en rendent témoignage. Ce sont, en particulier, les déterminations de longitude par observations astronomiques, faites par ces missionnaires, soit durant leurs voyages, soit dans leurs résidences de Chine, qui ont définitivement assuré la correction des longitudes de l'Extrême-Orient, et fixé la véritable étendue de l'ancien continent, si démesurément dilaté de l'ouest à l'est sur toutes les cartes depuis Ptolémée : résultat souverainement important non seulement pour la géographie, mais aussi pour la navigation. Puis était venue la grande opération du levé de la carte de Chine et de Tartarie, où les jésuites français eurent encore la plus grande part (1708-1718). Pour tous les lieux importants de cette carte gigantesque, la position, au moins en latitude, fut fixée par des observations astronomiques directes, qui coûtèrent des voyages prodigieux et d'énormes fatigues.

Un champ différent, mais non moins fécond, s'offrait au zèle astronomique de Gaubil. Tandis que ses prédécesseurs, par leurs observations, avaient surtout servi la science de la terre, il ambitionnait, lui, de concourir directement au progrès de la science du ciel. Il connaissait les lacunes de l'astronomie de son temps, et il comptait trouver des avantages particuliers pour en combler quelques-unes dans le poste qu'il occupait aux extrémités de l'Asie. Ce n'était pas une illusion. Seulement, pour réaliser ce beau dessein, il fallait des secours matériels qui manquèrent trop au missionnaire astronome. Toute sa vie, il réclama des instruments précis, et un observatoire tel que l'exigeaient les observations délicates qu'il avait en vue. À son grand chagrin, il ne put obtenir tout cela que dans une mesure bien imparfaite.

Rappelons, à ce propos, que les jésuites français n'eurent jamais la disposition du grand observatoire de Péking... Pour pouvoir offrir aux savants européens des résultats dignes de quelque attention, ils étaient donc obligés de faire venir à grands frais des instruments d'Europe et d'installer des observatoires du mieux qu'ils pouvaient dans leurs maisons. Ainsi, pour le dire en passant, les observations des pères Kögler et Hallerstein, qui ont été publiées en partie dans divers recueils de sociétés savantes, et plus complètement par le père Hell (1768), avaient été faites presque toutes au collège portugais, avec des instruments dus à la munificence des rois de Portugal. Louis XIV avait aussi fait pourvoir d'instruments astronomiques les premiers jésuites qu'il envoya en Chine avec le titre de « mathématiciens du roi de France ». Mais, à l'arrivée du père Gaubil, ces instruments étaient eux-mêmes déjà devenus insuffisants ; d'ailleurs, on avait dû en sacrifier, et des meilleurs, comme présent plus ou moins forcé à l'empereur Khang-hi. Quant à l'observatoire, il restait à faire dans la maison française. Diverses causes, notamment les travaux si variés et les voyages imposés par Khang-hi aux plus capables d'entre les missionnaires, avaient toujours empêché l'exécution des plans formés pour cet objet important.

Avec l'aide de ses confrères de Paris, et surtout du père Étienne Souciet, Gaubil put se procurer, d'abord, quelques instruments des plus essentiels, puis un peu d'argent pour entreprendre la construction d'un petit observatoire. Mais le tremblement de terre de septembre 1730, qui renversa presque toute la maison des jésuites français, lui apporta un terrible contre-temps. Il y perdit, avec beaucoup de papiers, quelques-uns de ses instruments astronomiques, et vit ruiner son commencement d'observatoire, fruit de tant de peines.

Il lui fallut encore attendre longtemps, avant de pouvoir même songer à réparer ces pertes, quelque sensibles qu'elles fussent pour lui... Ces difficultés n'auraient pas existé, si son ordre avait possédé, soit en Chine, soit en France, les immenses richesses que ses ennemis lui supposaient. En France, on a vu, lors de la suppression avec confiscation ordonnée par le Parlement, combien cette supposition était fausse. Elle ne l'était pas moins en ce qui concernait les missions, et la Chine en particulier. Comme s'exprimait le père de Hallerstein dans une lettre au secrétaire de la Société royale de Londres en 1750, « la prétendue richesse des jésuites à Péking était une fable. » On pourrait croire que les empereurs tenaient à rémunérer les services si variés et souvent si pénibles que les Européens leur rendaient. Il n'en était rien, et c'est à peine s'ils subvenaient pour une petite part à l'entretien des missionnaires de la cour ; ils s'imaginaient les payer largement par quelques marques d'honneur et par la liberté plus ou moins grande qu'ils laissaient, à eux et à leurs confrères des provinces, pour la prédication de l'Évangile. De fait, ce dernier point était tout ce que les missionnaires demandaient pour prix de leurs peines ; ils se confiaient à la charité de l'Europe catholique pour le reste.

C'est au gouvernement de la France qu'il eût appartenu de mettre la mission française de Péking mieux en mesure de remplir sa double destination, religieuse et scientifique. Les missionnaires lui adressèrent plus d'une fois l'exposé de leurs besoins, qui n'étaient pas toujours des besoins matériels seulement. L'appui, soit matériel, soit moral, qu'ils obtinrent, ne fut, croyons-nous, que très intermittent et faible. Les lettres de Gaubil sont pleines de doléances à ce sujet. Par exemple, le 7 octobre 1737, il écrit à Fréret, qui avait offert aux jésuites de Péking de faire agir en leur faveur un de ses amis bien vu de Maurepas, alors ministre de la Marine : « Ce qui est de bien certain, c'est que notre mission française aurait grand besoin de la protection d'un seigneur tel que M. de Maurepas. Quand le feu Roy (Louis XIV) fonda cette maison et la mission française, on fit les plus beaux règlements, et je ne sais par quel accident il est arrivé que, depuis bien des années, les choses ne sont pas ici pour nous comme je le souhaiterais. »

À vrai dire, Gaubil et ses confrères n'ignoraient pas à quoi tenait l'abandon où le gouvernement de Louis XV laissait l'œuvre de Louis XIV. Personnellement bien disposés, en général, pour la mission, le roi et ses ministres n'osaient la soutenir ouvertement, par crainte d'attirer sur eux-mêmes les attaques de jour en jour plus violentes dont la Compagnie de Jésus était poursuivie par la secte janséniste et les « philosophes ». Aussi, le 19 septembre 1733, apprenant l'insuccès de quelques démarches du père Ét. Souciet, Gaubil n'en remercie pas moins son confrère, en ajoutant : « Si votre zèle n'a pas tout le succès que vous attendez, il faut s'en prendre aux circonstances fâcheuses où se trouve la Compagnie, à Paris. »

À Fréret, il dit, le 2 novembre 1738 : « J'ai écrit, là-dessus (au sujet des secours désirés pour la mission), à plusieurs de nos Pères de France ; ils m'ont répondu que le roi, les ministres, protègent véritablement nos missions, mais que les jésuites sont trop persécutés en France pour attendre des secours. »

Le manque de ressources qui entrava trop souvent l'ardeur de Gaubil lui était d'autant plus sensible, qu'il voyait ses confrères de la maison portugaise relativement favorisés. Cette comparaison n'était pas moins pénible à son patriotisme qu'à son zèle scientifique : « Faute de lieu commode, écrit-il au père Souciet, en septembre 1733, je ne puis faire que peu de chose... Si j'avais un lieu fixe, je ferais sans peine un grand nombre d'observations qu'on ne peut faire en Europe... Les Pères Portugais font beaucoup d'efforts pour observer beaucoup ; ils ont de grands secours, un lieu assez commode et chez eux ; leur roi leur envoie de beaux présents ; et nous nous trouvons hors d'état de rien faire. »

Cependant, au milieu de tous ces embarras, le père Gaubil ne perdit jamais courage. Son énergie s'exaltait, pour ainsi dire, à l'obstacle. Nous avons cité les mots suivants qu'il écrivait au père Souciet, le 13 novembre 1725 : « Je suis venu dans un mauvais temps, vous le voyez assez. » Mais il continue : « Je vous dirai une chose, c'est que plus nous avons ici de contretemps, et plus je me sens de courage. » Il ajoute avec humilité : « Je veux bien faire, mais le pouvoir ne répond pas, et mes péchés me privent sans doute de beaucoup de secours d'en haut. »

La vérité est qu'il fit énormément durant la carrière que la Providence lui a donnée. Un de ses supérieurs, le père Julien-Placide Hervieu, avait raison de ne pas l'appeler autrement que l'infatigable père Gaubil. Au milieu des labeurs du ministère apostolique, dont il fit toujours son « principal », comme il l'a dit, il sut pousser de front des œuvres considérables dont chacune aurait suffi à occuper un homme moins actif.

Pour venir enfin à ses travaux astronomiques, les observations occupent presque toujours une grande place dans ses envois annuels à ses divers correspondants. Il semble que, à la lettre, il ne cessât pas un instant d'être à l'affût pour saisir et étudier tous les phénomènes propres à enrichir la science du ciel. Le père Étienne Souciet a publié, en 1729, la plupart des observations qu'il avait reçues de son confrère à cette date. Mais les autres, en bien bien plus grand nombre, que Gaubil a envoyés en Europe, de 1728 à 1758, sont presque toutes restées ensevelies dans les collections qui renferment aussi ses lettres, et surtout parmi les papiers de Joseph-Nicolas de l'Isle. Elles se rapportent à tous les genres de phénomènes qui fixent l'attention des astronomes : hauteurs méridiennes du Soleil et des planètes ; relations successives de celles-ci, dans leur révolution, avec des étoiles connues ; occultations des étoiles par la Lune ; occultations des satellites de Jupiter ; éclipses de Soleil et de Lune ; passages de Vénus et de Mercure sur le Soleil ; marche des comètes, etc. Toutes ces observations trahissent un véritable astronome, pratiquement exercé, plein de zèle et surtout consciencieux au plus haut degré. Quant à ce dernier point, voici une déclaration que fait Gaubil, en envoyant au père Souciet, sous bénéfice d'inventaire, quelques résultats incertains : « Dans les observations, comme dans les comptes des procureurs, c'est un très grand défaut d'être trop exact et trop juste, non pas dans les précautions, mais dans le succès (le résultat), et j'aimerais toujours mieux dire, soit que je ne sais pas, ou que je ne suis pas sûr, que de faire entendre que je sais ou que je suis sûr. »

Un des grands mérites de Gaubil, c'est qu'il est resté fidèle à ce principe dans tous ses écrits.

Les travaux d'un pareil observateur ne pouvaient manquer d'avoir une sérieuse valeur, alors même que le défaut de certaines ressources les empêchait d'acquérir toute la perfection désirable. Sans parler des phénomènes qu'on ne pouvait observer qu'en ces climats lointains, la comparaison de ces observations de Chine avec celles qui se faisaient aux mêmes moments dans les observatoires d'Europe devait naturellement être intéressante et fructueuse pour la science. Gaubil était persuadé, non sans fondement, que cette comparaison pouvait, entre autres résultats, fournir « des principes décisifs pour la théorie des planètes », théorie encore très discutée et réellement imparfaite en ce temps-là. Dans son désir de profiter des bénéfices de cette comparaison, il était impatient de connaître tout ce qui se produisait de nouveau dans le domaine de l'astronomie. Pour cela, il s'efforça d'abord d'obtenir un échange régulier d'observations avec ceux de ses confrères qui cultivaient cette science, soit en Europe, soit dans les missions. Le 17 novembre 1728, il écrit au père Souciet qu'il a pris des mesures pour recevoir des observations de la Russie, des Indes, de la Cochinchine, de Manille aux Philippines, etc. Il en reçut plus d'une fois de tous ces pays et de bien d'autres, ses écrits l'attestent. Hors d'Europe, ce furent surtout ses confrères français de l'Inde, les pères Ducros, Duchamp, Boudier, qui répondirent à ses appels... Ajoutons qu'en Chine même, outre les missionnaires jésuites qui observaient régulièrement dans les maisons de Pékin, d'autres qui exerçaient secrètement le ministère apostolique dans les provinces, s'industriaient, au milieu de dangers et de fatigues exceptionnels, à saisir au passage les phénomènes astronomiques les plus importants. Parmi eux, Gaubil mentionne, en particulier, le père Simonelli, Italien, dans le Kiang-nan, et le père Chanseaume, Français, dans le Hou-Kouang. Naturellement, en France, où les jésuites avaient attaché des observatoires à tous leurs grands collèges, à Paris, Lyon, Marseille, Avignon, Nantes, Brest, etc., le père Gaubil trouva aussi d'utiles correspondants parmi ses confrères.


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L'ancienne astronomie de la Chine

On connaissait bien peu de monuments authentiques de l'astronomie tant vantée de ces deux savantes nations [la Chaldée et l'Égypte], quand les missionnaires jésuites révélèrent à l'Occident étonné l'ancienne astronomie de la Chine. Déjà le père Nicolas Trigault, dans le livre composé d'après les mémoires du fondateur de la mission, du père Matthieu Ricci, puis le père Adam Schall, dans ses lettres, avaient donné d'intéressantes indications sur ce sujet, en appuyant, toutefois, principalement sur l'astronomie chinoise du treizième siècle et des temps modernes, laquelle dérive, en grande partie, des Indiens et des Arabes. Ce furent surtout les publications des pères Martini et Couplet qui excitèrent vivement l'attention de toute l'Europe lettrée, en faisant connaître, d'après les livres chinois, des observations astronomiques qui se réclamaient d'une antiquité de trois à quatre mille ans et au delà. Malheureusement, ces publications n'apportaient pas encore tous les éléments nécessaires pour juger de l'authenticité et de l'exactitude de ces observations si curieuses. Bien plus, elles contenaient quelques données suspectes ou même évidemment fausses, qui jetèrent du discrédit sur l'ensemble. Aussi, à la surprise du premier moment succéda bientôt le doute, puis l'incrédulité, chez la plupart des astronomes d'Europe.

Il était réservé au père Gaubil de ramener une appréciation plus saine de l'antique astronomie chinoise. Notre missionnaire possédait, pour cette tâche, un ensemble de qualités qu'il eût été difficile de réunir à un plus haut degré : la science et la pratique de l'astronomie moderne, la familiarité avec la langue et la littérature de la Chine, enfin une critique judicieuse, qui ne se laissa jamais séduire par une idée préconçue ou par une autorité mal contrôlée. Jacques Cassini fut donc bien inspiré quand, en 1724, il invita Gaubil à reprendre sur nouveaux frais toutes les questions relatives à l'astronomie des anciens Chinois. Pour lui, il croyait alors que ces Chinois n'avaient pas eu de véritable astronomie. Néanmoins, en 1724, comme nous venons de le dire, il remit au père Souciet, pour son confrère de Péking, une sorte de questionnaire qu'il avait rédigé de concert avec Maraldi et Joseph-Nicolas de l'Isle, et où il spécifiait les principaux points à éclaircir au sujet de l'astronomie chinoise. Le missionnaire y répondit d'abord, en novembre 1725, par des notes sommaires qui ont été publiées par le père Souciet, en 1729, et reproduites plus tard par le père du Halde. Il promettait, en même temps, de traiter le sujet plus à fond, en faisant (comme on le lui avait demandé) pour l'astronomie chinoise quelque chose de semblable à ce que Dominique Cassini avait fait pour l'astronomie indienne.

En effet, Gaubil ne cessa depuis lors d'étudier cette matière, et de ces recherches, continuées pendant plus de trente ans, résultèrent un grand nombre de notices et de mémoires plus ou moins étendus, qu'il adressa soit au père Souciet, soit aux Académies de Paris et de Londres. Une bonne partie de ces travaux a été publiée, principalement dans le deuxième et le troisième tome des Observations et dans le dernier volume des Lettres édifiantes et curieuses. Si le tout avait été mis à la portée des savants, il n'aurait probablement rien manqué à ceux-ci pour fixer leur jugement sur la valeur de l'astronomie chinoise. En tout cas, ils auraient eu sous la main l'ensemble des éléments que la littérature chinoise peut fournir pour la solution de ce problème.

Il serait trop long d'énumérer tout ce que la correspondance du père Gaubil renferme d'écrits sur ce sujet. Contentons-nous d'indiquer les plus importants. Il avait envoyé, en France, dès 1727, le manuscrit de l'Histoire abrégée de l'Astronomie chinoise et le Traité de l'Astronomie chinoise, qui furent édités par le père Souciet, en 1732. On y trouve recueillies et discutées les observations et les découvertes célestes faites par les anciens Chinois, depuis l'époque de Yao (XXIVe siècle avant J.-C.), jusqu'au quinzième siècle de notre ère. Il y est question, non seulement de leurs observations d'éclipses, qui ne demandaient que des yeux, mais encore et surtout des connaissances plus difficiles à acquérir qu'ils paraissent avoir eues par rapport à la longueur exacte de l'année et des saisons, au mouvement du Soleil, des planètes et même des étoiles, etc. Chemin faisant, Gaubil explique les méthodes d'observation et de calcul employées par les astronomes chinois des différentes époques. Pour ce qui est des connaissances astronomiques attribuées par les livres classiques aux fondateurs mêmes de la monarchie, c'est-à-dire aux Chinois d'il y a plus de quarante siècles, il prouve qu'elles leur ont réellement appartenu, et il en conclut à une science déjà fort au-dessus des rudiments dans cet âge reculé.

Cet ouvrage se présenta au monde savant avec une recommandation précieuse. À la fin du premier volume (tome II des Observations), après la permission d'imprimer du père Bretonneau, vice-provincial des jésuites de France, qui est du 14 janvier 1731, on lit l'extrait suivant d'une lettre de Cassini à l'éditeur, en date du 28 décembre 1730 : « J'ai lu, avec attention, l'Histoire et le Traité de l'Astronomie chinoise avec les autres traités de chronologie que vous avez bien voulu me confier, et j'y ai trouvé des recherches curieuses, dont j'ai été fort satisfait. Je suis persuadé que ces ouvrages méritent d'être donnés au public... »

Quelque flatteur que fût ce jugement, Gaubil aurait mieux aimé autre chose. Une critique sérieuse des faits qu'il avait apportés et des conclusions qu'il croyait pouvoir en tirer lui eût été bien plus agréable que les éloges un peu vagues de Cassini. Comme il le dit plus tard, en répondant aux objections d'un savant anglais, G. Costard : « Cela n'avait pas été envoyé de Péking en France pour être imprimé, mais pour être examiné par des hommes habiles. »

C'est, en effet, dans ce sens qu'il avait plusieurs fois exprimé ses intentions au père Souciet, ainsi que nous l'avons déjà fait remarquer : « C'est pour Messieurs de l'Observatoire, lui avait-il dit en lui envoyant son manuscrit en 1727. »

Loin de regarder son ouvrage comme le dernier mot de la controverse, il ne cessa de faire de nouvelles recherches pour le compléter, et il en reprit toutes les parties en sous-œuvre pour les corriger ou les fortifier. De là résultèrent plusieurs écrits considérables, dont quelques-uns entièrement nouveaux.

Parmi ces derniers, citons un Catalogue des Comètes vues à la Chine depuis 613 avant J.-C. jusqu'en 1539. Ce morceau qu'il envoya, le 16 octobre 1737, à Nicolas Fréret, fut utilisé par Pingré, dans sa Cométographie (1783).

Mais celui de ces travaux de détail qui est, sinon le plus important, du moins le plus célèbre par l'usage qu'en ont fait de grands astronomes, est celui qui concerne les Observations des Solstices et des Ombres méridiennes du Gnomon, faites en Chine entre le douzième siècle avant et le quatorzième après J.-C. Gaubil avait donné des renseignements partiels sur ces observations dans son Traité de l'Astronomie chinoise ; mais il annonçait au père Souciet, le 16 septembre 1730, qu'il les étudiait encore. Elles excitaient son intérêt à juste titre, surtout à cause de la relation qu'elles pouvaient avoir avec un problème d'astronomie fondamental et alors très débattu, le changement de l'inclinaison de l'écliptique. On sait aujourd'hui que l'obliquité de l'orbite apparente du Soleil par rapport à l'équateur est en voie de diminution graduelle. Les savants de la première moitié du dix-huitième siècle étaient encore partagés sur ce point ; les uns tenaient pour la diminution, les autres pour l'augmentation progressive, quelques-uns même pour la fixité de l'obliquité de l'écliptique. Gaubil penchait vers la troisième opinion, qui était celle du père Riccioli et de La Hire. Mais ses idées propres n'influencèrent jamais ses recherches ; son unique souci fut toujours de faire jaillir et briller la vérité. En examinant avec soin les observations des solstices et des ombres méridiennes conservées dans les livres chinois, il constata qu'elles tendaient toutes à confirmer la diminution graduelle de l'écliptique depuis l'époque où elles avaient été faites. Cependant, il n'osa point prendre un parti d'après cet examen personnel ; il se contenta d'en communiquer les résultats à ses correspondants de Paris, pour être soumis au jugement de l'Académie des sciences. L'Histoire de cette compagnie savante pour l'année 1743, contient le résumé d'une note qu'il avait adressée, dans cette vue, à Dortous de Mairan, dès 1734, en promettant plus de détails pour l'année suivante. Le rédacteur de l'Histoire de l'Académie, qui était Mairan lui-même, en 1743, exprime le regret que ces détails, « qui seraient d'une très grande importance », ne soient pas encore parvenus à l'Académie. Gaubil les avait envoyés, cependant. Ces détails faisaient partie d'un long manuscrit intitulé : Recherches astronomiques sur les constellations et les catalogues chinois des étoiles fixes, sur le cycle des jours, sur les solstices et sur les ombres méridiennes du Gnomon observées à la Chine, manuscrit que le missionnaire avait adressé, le 23 juillet 1734, à l'astronome J.-N. de l'Isle, alors à Saint-Pétersbourg, avec charge de le transmettre au père Souciet, qui devait en faire part à Mairan. De l'Isle reçut le paquet en janvier 1735 et le réexpédia le mois suivant au père Souciet, après en avoir pris copie. Nous ne savons ce qu'est devenu ensuite le manuscrit original. La copie de de l'Isle, cédée avec ses autres papiers au Dépôt de la Marine, puis transportée à l'Observatoire, tomba sous les yeux du célèbre Laplace, au commencement de ce siècle. L'auteur du Système du monde lut le mémoire de Gaubil avec le plus vif intérêt. Il se convainquit que les observations chinoises décrites par le missionnaire étaient « précieuses, non seulement par leur antiquité, mais encore par leur exactitude », et qu'elles étaient les plus précises que l'ont ait faites avant le renouvellement de l'astronomie, et même avant l'application du télescope au quart de cercle ». En raison de cette précision, l'accord remarquable des résultats qu'elles donnaient avec ceux qu'on déduit de la théorie de l'attraction universelle, était une confirmation frappante de cette théorie. Aussi Laplace constate avec satisfaction que ces observations, de date si ancienne, « prouvent d'une manière incontestable les diminutions de l'obliquité de l'écliptique et de l'excentricité de l'orbe terrestre, depuis cette époque jusqu'à nos jours. »

Sans doute, les astronomes n'ont plus besoin, aujourd'hui, de cette preuve ; mais elle avait son prix, il y a quatre-vingts ans. Laplace fit part de sa trouvaille au monde savant, en publiant dans la Connaissance des Temps pour 1809 la partie du manuscrit de Gaubil qui traite des solstices et ombres méridiennes du Gnomon observées à la Chine. L'avertissement placé en tête du volume annonce cet appendice comme contenant « des observations chinoises encore inédites, et les plus anciennes dont les détails nous aient été transmis avec assez de soin pour servir de base à des calculs sur lesquels on puisse compter. M. Laplace en a déduit des solstices qui paraissent plus certains que ceux d'Hipparque et de Ptolémée... »

Disons, toutefois, que ces observations n'étaient pas entièrement inédites, comme cette note le donnerait à entendre. Dès 1757, l'abbé de La Caille en avait cité les plus importantes dans son mémoire sur la Théorie du Soleil. Cet astronome, qui est célèbre par son merveilleux talent d'observateur, faisait déjà ressortir, lui aussi, l'exactitude des déterminations chinoises rapportées par Gaubil, et recommandait, à l'attention de ses confrères les conséquences qu'il en dégageait et qui sont les mêmes que Laplace en a tirées plus tard. La Caille avertit que les mesures du gnomon qu'il publie lui ont été fournies par de l'Isle. Il a donc pu exploiter, non seulement le travail envoyé en 1734, mais encore d'autres éclaircissements que De l'Isle a reçus depuis, notamment en 1748. Ces informations complémentaires de Gaubil se rapportaient surtout aux observations solsticiales et méridiennes de Cocheou-King, astronome de l'empereur mongol Khoubilay (1279 ap. J.-C.). Ce sont précisément les observations que la Caille a utilisées, et que Laplace regarde aussi comme les plus remarquables.


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L'antiquité de la nation chinoise

On peut le dire sans exagération, la question de l'antiquité de la nation chinoise est une de celles qui ont passionné le public instruit au temps de Louis XIV et de Louis XV. Aujourd'hui, les quarante siècles que réclament les chronologies les plus modestes de la Chine n'ont plus de quoi nous étonner beaucoup, alors que les égyptologues exigent plus de cinquante siècles pour les monuments de l'Égypte, et que les assyriologues commencent à en demander presque autant pour la civilisation chaldéenne, sans parler des prétentions bien moins fondées des archéologues préhistoriciens. Il en allait autrement il y a cent ou deux cents ans. Non seulement l'antiquité fabuleuse que certains écrivains chinois attribuaient à leur monarchie, mais encore la chronologie modérée, admise par les missionnaires jésuites d'après les historiens les plus sérieux du pays, allaient contre les doctrines reçues par la plupart des érudits d'Europe.

La grande objection était la difficulté de concilier des dates si reculées avec la chronologie de la Bible ou du moins avec l'interprétation plus ou moins étroite qu'on croyait devoir donner à certains textes bibliques. Cette difficulté devenait une véritable impossibilité dans le cas où l'on prenait, avec les plus savants chronologistes de l'époque, les chiffres du texte hébreu des généalogies de la Genèse, comme base de la chronologie primitive.

Aux alarmes de l'orthodoxie s'ajoutaient, chez beaucoup, des préventions encore bien plus étrangères à la science.

C'étaient des missionnaires jésuites qui avaient présenté la chronologie de la Chine au monde savant et, quoiqu'ils n'eussent pas même réussi à la faire approuver de tous leurs confrères (le père Étienne Souciet, par exemple, tint toujours avec le père Pétau pour la chronologie des Masorètes et de la Vulgate), il n'en fallait pas davantage à nombre de gens pour la classer parmi les thèses patronnées par les jésuites et, conséquemment, la prendre en antipathie.

De fait, les jésuites de Chine adoptèrent presque tous le calcul qui fixait le commencement des temps historiques de la Chine au moins vers 2300 avant Jésus-Christ. Ils avaient bien eu leurs scrupules, eux aussi, surtout au début de la mission, et il en était résulté une discussion intime que le père Gaubil rappelle en plusieurs endroits. Ce n'était pas pour eux une question de pure théorie : « Ceux, dit Gaubil, qui regardent la chronologie ordinaire de la Vulgate comme la seule qu'on puisse suivre, ne pourraient le dire sans exposer la religion ; le gouvernement chinois procéderait contre eux... puisqu'il s'ensuivrait de là que les empereurs, Yu, Chun, Yao, par exemple, n'ont jamais été en Chine. Cela révolterait les esprits. »

La chronologie de la version des Septante, que les Pères de l'Église ont suivie, n'offrait pas le même inconvénient. Aussi, après avoir fait examiner sérieusement les bases de la chronologie chinoise, non seulement par les plus savants de leurs missionnaires, mais encore par des astronomes séculiers (dont le célèbre Kepler), les supérieurs de la Compagnie de Jésus enjoignirent à leurs subordonnés dans la mission de Chine de suivre les calculs des Septante, quand leur ministère les obligerait de toucher à la chronologie.

Toutefois, ils leur recommandaient instamment de ne pas faire entendre aux Chinois que cette chronologie était un point décidé par l'Église ou évidemment démontré. Cet avis fort juste et sage avait aussi sa raison d'être toute spéciale en Chine : « Les Chinois, écrit encore Gaubil, sont instruits de nos divers systèmes de chronologie ; ils s'en sont aperçus par les divergences des livres chinois des missionnaires ; et cela leur a fait concevoir du mépris pour l'Écriture sainte, parce qu'ils ne savent y distinguer les dogmes de foi d'avec les points susceptibles de divers sens. »

Évidemment, il n'y avait rien que de légitime dans la concession qu'on faisait à la susceptibilité nationale des Chinois, en adoptant, parmi les systèmes que l'Église tolère en matière de chronologie biblique, celui qui s'accordait le mieux avec leur chronologie traditionnelle. Les adversaires des jésuites ne manquèrent pas, néanmoins, de mettre cette concession presque sur la même ligne que celles qu'ils les accusaient de faire à la superstition en matière de rites chinois.

Enfin, il faut ajouter que, toutes préventions à part, les premiers ouvrages où l'antiquité chinoise fut exposée à l'Europe, prêtaient le flanc à la critique et justifiaient, dans une certaine mesure, l'incrédulité. Ainsi, les pères Martini et Couplet avaient indiqué, comme bases principales de la chronologie chinoise, les observations astronomiques, notamment d'éclipses, qui sont contenues dans les livres canoniques et les histoires officielles de l'empire. Seulement il leur était arrivé (ce qui arrive, du reste, aux auteurs les plus consciencieux qui sont les premiers à traiter un sujet difficile) de mêler des arguments ruineux à des preuves excellentes et de ne pas toujours présenter ces dernières sous le jour qui en fait voir la force. Aussi, les savants d'Europe, en discutant rigoureusement les données qu'ils fournissaient, étaient parvenus à des conclusions souvent peu favorables à l'antiquité chinoise. Par exemple, Dominique Cassini, après avoir calculé la conjonction supposée des cinq planètes sous Tchouen-hiu d'après les indications du père Martini, trouva qu'elle ne peut se placer qu'en l'an 2012 avant Jésus-Christ, c'est-à-dire cinq siècles après l'époque admise par le père Martini avec les historiens chinois. Le même astronome avait conclu des imperfections de la Table chronologique du père Couplet, que les anciens Chinois « n'avaient jamais eu de méthode fixe ni certaine pour régler leurs années », en d'autres termes pas de calendrier régulier, et que, par suite « on ne saurait se tirer des embarras qu'il y a pour cette cause dans la chronologie chinoise ».

Cette question de l'antiquité des Chinois devait attirer Gaubil par ses difficultés mêmes. Il l'aborda résolument, dès qu'il fut en état de lire les documents originaux. Il débuta, comme il était naturel, par un travail de contrôle sur l'œuvre de ses prédécesseurs. Avec sa critique pénétrante qui ne s'arrêtait que devant l'évidence, il reconnut bientôt l'erreur ou l'insuffisance d'une partie de leurs arguments. Ce qu'il avait reconnu, il n'hésita pas à l'exprimer hautement, car l'esprit de corps en matière scientifique lui était inconnu.

Nous avons déjà vu comment il rejeta dans le domaine des fictions astrologiques la fameuse conjonction des cinq planètes sous Tchouen- hiu, montrant ainsi qu'il n'y avait rien à en déduire ni pour ni contre l'antiquité chinoise.

Il fit preuve de la même sévérité scientifique au sujet des dates que de graves autorités ont tirées du chapitre Yao-tien du Chou-King (2e du premier livre). D'après ce document, l'empereur Yao apprit à ses astronomes à trouver le lieu des solstices et des équinoxes, en leur indiquant les constellations qui culminent, ou passent au méridien, immédiatement avant le coucher du Soleil, à l'époque du solstice ou de l'équinoxe, dans les quatre saisons. Avec l'aide de la tradition chinoise, qu'il n'y a aucune raison de suspecter ici, comme l'a prouvé Gaubil lui-même, on peut savoir à quelles étoiles de notre nomenclature répondent les positions indiquées par Yao, au moins d'une manière approximative. D'autre part, l'astronomie démontre que les points équinoxiaux ne sont pas fixes dans le ciel, et qu'ils se déplacent par rapport aux étoiles, suivant la progression d'environ cinquante secondes de degré par an. Il résulte de là que les phénomènes indiqués par Yao n'ont pu se présenter ensemble qu'à une époque déterminée, qu'il est possible de calculer. La pensée de chercher une donnée chronologique dans ce texte du Chou-King est donc bien naturelle.

C'est sur ce texte, entre autres, que s'étaient appuyés plusieurs anciens missionnaires de Chine, à commencer par le père Adam Schall, pour affirmer comme certain que l'empereur Yao régnait déjà dans le vingt-quatrième siècle avant l'ère chrétienne. En revanche, Dominique Cassini trouva de nouveau, dans les informations fournies par le père Martini, le moyen de rabattre cinq siècles sur cette date. Gaubil montra que Cassini, trompé par l'exposé équivoque du père Martini, avait pris pour une indication du Chou-King ce qui n'était qu'une interprétation sans valeur de quelques astronomes chinois, et que cette erreur lui avait fait retrancher indûment sept degrés sur la rétrogradation du point équinoxial depuis Yao ; sa réduction de cinq siècles sur le temps se trouvait annulée par là même.

Mais, d'un autre côté, le loyal missionnaire se refusa toujours à conclure une date précise des données du chapitre Yao-tien. Pour cela, comme il l'observe, ces données sont trop vagues : « On ne dit pas à quelle année de l'empire de Yao on fit cette détermination pour les quatre saisons (Yao régna cent ans d'après le Chou-King), et l'on ne peut pas assurer que, dans ces temps éloignés, on fût en état de faire bien exactement des observations qui demandent une si grande précision. »

Il admit seulement qu'elles « démontrent bien, en général, une grande antiquité », et qu'elles confirment plutôt qu'elles n'infirment la chronologie traditionnelle des Chinois.

Mais Gaubil ne s'arrêta pas à la critique négative. Après avoir fait passer au creuset toutes les preuves de l'antiquité chinoise, il crut voir qu'un certain nombre demeuraient inattaquables, quant à la substance. Ces éléments solides étaient encore des observations astronomiques, des observations d'éclipses, qu'il appela, pour cela, les « oracles du ciel », dans la question de la chronologie chinoise. Dès le 18 août 1723, il put envoyer au père Souciet et à Cassini le calcul qu'il avait fait de seize éclipses du Soleil notées dans les histoires chinoises, et qui auraient été observées entre l'an 2155 avant et 638 après Jésus-Christ. Le père Souciet a imprimé ces calculs, encore un peu imparfaits, comme l'auteur le déclara tout le premier. Gaubil les reprit plus d'une fois avec de nouveaux soins, notamment avec des tables astronomiques perfectionnées. Les époques qu'il a ainsi déterminées restent, en somme, acquises à la science chronologique.


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