Kong-tze Kia-yu, Les entretiens familiers de Confucius
traduits par Charles de HARLEZ (1832-1899)
Ernest Leroux, éditeur, Paris, 1899, 196 pages.
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Éd. Chavannes, notes dans Mém. Hist., V, 439 : "Entre les textes non-confucéens et les textes confucéens, il faut faire une place à
part à deux ouvrages dont certains passages se retrouvent dans le chapitre XLVII de Se-ma Ts’ien ; ce sont le Kia yu et le Li ki. Il serait difficile de considérer le
Kia yu actuel comme une des sources auxquelles puisa Se-ma Ts’ien ; déjà Yen Che-kou (579-645) déclarait que le Kia yu qu’il connaissait n’avait rien de commun avec
l’ouvrage malheureusement perdu qui est catalogué sous ce nom dans le Ts’ien Han chou (chapitre XXX, p. 7 r°), et la critique chinoise moderne s’accorde à reconnaître dans le Kia
yu actuel l’œuvre de Wang Sou, mort en 256 de notre ère. Mais, si le Kia yu n’a reçu sa forme définitive que trois siècles environ après la publication des Mémoires
historiques, et si par conséquent on ne peut le regarder comme une des sources de Se-ma Ts’ien, il serait également faux de soutenir la proposition inverse et de dire que c’est Wang Sou
qui a fait des emprunts directs à Se-ma Ts’ien. Il semble plutôt que Wang Sou ait recueilli un certain nombre de documents plus anciens qui avaient déjà été utilisés par son illustre
prédécesseur ; les variantes que présentent les deux rédactions des Mémoires historiques d’une part et du Kia yu d’autre part prouvent qu’elles sont indépendantes l’une de
l’autre ; peut-être leur source commune est-elle précisément ce Kia yu aujourd’hui perdu qui apparaît dans le catalogue littéraire du Ts’ien Han chou. Une conclusion
analogue s’impose lorsqu’il s’agit du Li ki dont les recensions successives se poursuivirent jusqu’au premier et au second siècle de notre ère ; les points de contact entre le texte
du Li ki et celui des Mémoires historiques sont d’ailleurs peu nombreux et n’atteignent à l’identité verbale que dans le récit de la mort de Confucius, Ainsi donc bien que
le Kia yu et le Li ki actuels ne soient pas au nombre des sources immédiates des Mémoires historiques, ils reproduisent cependant quelques documents anciens qui
peuvent être tenus à juste titre pour être ceux-là mêmes dont s’inspira Se-ma Ts’ien.
Si les textes du Kia yu aussi bien que ceux du Li ki ne sont pas à proprement parler hétérodoxes, on ne saurait cependant les ranger dans la catégorie des textes purement confucéens."
- Qualité de la traduction. Harlez : "Pour satisfaire tous les sinologues j'ai fait cette version aussi littérale que possible, tout en le regrettant pour les lecteurs non spécialistes." — Chavannes, Mém. Hist., V, note 650 : "Le Kia yu a été partiellement et d’ailleurs assez mal traduit d’abord par le Rev. A. B. Hutchinson sous le titre The family sayings of Confucius, puis par Mgr. De Harlez sous le titre The familiar Sayings of Kong-fu tze."
Extraits : Introduction — Kong-tze en fonction — Kong-tze en danger — Du destin fondamental
Tze-kong sauve Lou par son éloquence — Conduite des disciples (de K'ong-tze) — [33 des 72 disciples]
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Le livre des Kia-yu remonte originairement au temps qui suivit la mort de
Kong-fou-tze. S'il faut en croire les exégètes sérieux tels que Wang-su, ce fut l'œuvre des disciples immédiats du philosophe. Ceux-ci avaient consigné les dires authentiques et importants (A)
dans un ouvrage qu'ils avaient appelé le Lun-yu « les entretiens d'autorité ». Ils recueillirent ensuite tout ce qui avait été omis et en formèrent les Kia-yu ou « Entretiens
familiers » de moindre importance. Après eux les fragments de ce recueil se dispersèrent et quand tous les disciples du grand homme eurent disparu, leurs successeurs en firent à leur fantaisie.
Un seul d'entre eux les recueillit et les remit au roi Tchao-siang de Ts'in avec d'autres ouvrages, en tout 110 piens (vers 254 A. C.). Les Kia-yu échappèrent aux bûchers de
Shi-hoang-ti, grâce au zèle de Kong-fou-kiao, descendant du Grand philosophe qui les cacha, dit-on, dans une muraille soigneusement cimentée.
L'avènement des Han avait encore augmenté leur notoriété. Nous les trouvons alors entre les mains de Liu-shi dans un étui de buis grand de 2 pieds, et nous les voyons figurer au catalogue de la
bibliothèque de ces souverains sous la rubrique des Lun-yu, à la 5e place sous cette formule : Kong-tze Kia-yu, 27 kiuen (voir le Han i wen tchi, K. 4.)
Ils étaient encore pleins de caractères antiques.
Une édition avec commentaire est attribuée au célèbre disciple et exégète Kong-gan-koue, qui l'aurait présentée à Hiao-wou-ti des Hans à la fin du IIe siècle A. C. après avoir changé les anciens
caractères.
Au 2e siècle de notre ère nous les trouvons encore cités dans les célèbres commentaires de Tcheng-siuen. Après cela ils vinrent à se perdre complètement ; et quand, au siècle suivant, Wang-su
commenta les Kia-yu, ce n'était déjà plus l'ouvrage primitif. C'est ce qu'atteste Ma-tchao en ces termes : Les Kia-yu actuels que Wang-su a développés ne sont pas ceux que
Tcheng-siuen avait vus.
Et d'autre part, Sze-ku dit également des 27 kiuen : Ce ne sont point les Kia-yu qui existent maintenant.
En effet le texte actuel est divisé en 44 Tis partagés entre 8 ou 10 kiuens, selon les éditions.
Comment s'opéra cette transformation ? On l'ignore.
On croit généralement que Wang-su lui-même en fut l'auteur, qu'il retrancha certains passages, en ajouta d'autres puisés à d'autres sources et modifia la division totale.
On prétend que les Kia-yu avaient été rédigés par Wang-su dans le but de confondre les interprétations que Tcheng K'eng tcheng, de la fin des Hans, donnait au Lun-yu et aux paroles
traditionnelles de Kong-tze.
Comme le nouveau texte était accompagné d'un commentaire et que l'ancien n'existait probablement qu'en un très petit nombre d'exemplaires, le premier eut bientôt supplanté complètement l'autre
qui tomba dans l'oubli. Ainsi tout s'expliquerait aisément.
Mais le témoignage de Wang-su n'est pas à rejeter sans examen. Or cet auteur affirme qu'avant lui les lettrés chinois ne s'étaient nullement gênés pour falsifier le texte ancien, pour en disposer
à leur guise, retranchant, ajoutant selon leur fantaisie (B).
L'empereur Hiao-king la dernière année de son règne fit rechercher tous les livres parus jusqu'à cette époque. On lui apporta les Kia-yu dans l'état où ils étaient alors et l'on constata
la différence existant entre ces textes et les données du catalogue de Liu-shi. Ce qu'on ne pouvait expliquer convenablement.
Enfin quand Wang-su entreprit une recension de notre ouvrage il se trouva en présence de 44 piens.
On voulut y joindre les Questions de Tzeng-tze (Tzeng-tze-wen) mais comme elles n'appartenaient pas à l'ouvrage originaire, elles furent rejetées et on les joignit au Li-ki dont
elles forment le Livre V.
Voilà ce que le célèbre commentateur atteste dans sa préface. Il y ajoute qu'il reçut son texte de Kong-meng, descendant à la 22e génération de Kong-tze, sa famille se l'étant transmis de père en
fils. Ce fut alors seulement qu'il se répandit.
On se demande comment il aurait pu tromper ses contemporains et leur faire accroire qu'ils avaient fait réellement ce que Wang-su avait tiré de son imagination.
Il est probable que le texte primitif est arrivé jusqu'à notre commentateur après avoir subi de nombreuses modifications, des retranchements, des ajoutés, un changement de division, etc. Wang-su
a, dit-on, puisé partout : Tso-tchuen, les Lis, les Kue-yu, etc.
Quelques-uns prétendent que Wang-su trouva les chapitres des Kia-yu et du Li-ki entremêlés, sépara les premiers et reconstitua le recueil antérieur. Tcheng-shi et Tchao-shi
affirment que notre commentateur le reçut d'un certain Meng, descendant de Kong-tze à la 24e génération ; ce serait ainsi l'ouvrage primitif.
Les Kia-yu sont très estimés des lettrés chinois. Lou-wen-tchao entre autres, dit dans sa préface qu'ils ne doivent jamais un seul jour sortir des mains des hommes d'étude, car c'est le
meilleur moyen de connaître ce que doit être la conduite d'un saint homme.
Aussi bon nombre de lettrés chinois, principalement ceux qui préparèrent l'édition commandée et dirigée par l'empereur Kien-long admettent que ce texte a été édité par Mao-tchang, le célèbre
éditeur et commentateur du Shi-king dans le second siècle de notre ère ; d'autres attribuent comme je l'ai dit, une bonne partie de sa composition à Kong-gan-koue, le célèbre descendant de
Kong-tze qui publia les Kings dans les dernières années de l'ère ancienne.
Mais il est évident que la source des Kia-yu n'est pas purement confucéenne puisque, comme on le verra plus loin, le philosophe de Lou nous y est présenté plusieurs fois comme l'élève de
Lao-tze.
Quoi qu'il en soit, notre texte actuel semble être celui que Wang-su publia et mit au jour. Plusieurs passages se retrouvent dans d'autres livres tels que le Ta-tai-li, le Li-ki
et le Tso-tchuen ; mais il y a entre ces textes des différences de rédaction telles que l'on ne saurait attribuer aux uns et aux autres une origine identique, une source commune. D'autre
part, le commentateur des Mings, Ho-meng-tchun, dit qu'il n'a point connu le texte de Wang su et qu'avant cette dynastie notre livre était presque inconnu.
Quelques traits historiques qui devraient entrer dans les récits des mêmes faits sont absents tantôt dans les Kings, tantôt dans les Kia-yu.
Nous ne prolongerons pas cette discussion dont nous avons donné les points essentiels ; plus de détails en ces matières incertaines et pleines de contradictions ne pourraient engendrer que la
confusion et l'ennui.
Le texte de notre livre a subi bien des vicissitudes. S'il faut en croire Lu-wen-tchao de la présente dynastie, les auteurs de l'époque des Tangs n'en ont fait guère que des citations fausses et
pleines d'erreurs. Ce serait Mao-k'i-ling de la fin des Ming qui rétablit le texte de Wang-su.
Du reste « Les Entretiens de Kong-tze » se trouvent maintenant encore dans des éditions de textes si différentes que l'on ne peut les considérer que comme des collections également différentes.
Nous en possédons deux spéciales que nous avons constamment confrontées, à savoir : celle éditée par ordre de Kien-long la 32e année de son règne avec les commentaires de Lou-wen-tchao et de
Kho-meng-tchun, et celle publiée à Shang-hai sous Tao-kuang, puis reproduite sous Tong-tchi avec le commentaire de Wang-su.
Ces deux rédactions sont entièrement indépendantes ; la seconde n'a pas seulement des leçons très différentes mais elle contient un grand nombre de passages dont l'authenticité est très douteuse
en raison même de leur contenu. Souvent ils n'ont aucun rapport avec le texte qui précède ou qui suit. Les éditeurs nous avertissent eux-mêmes, qu'on doit l'accepter avec circonspection. C'est
ainsi du moins que je comprends cette phrase de la préface (V, 4.). En outre les 44 chapitres du livre sont disposés diversement dans les 10 kiuens et les 3 derniers de la première édition
forment les 37e, 38e et 39e de la seconde. Il est toutefois à remarquer que le texte que Ma-tuan-lin avait sous les yeux comptait aussi dix livres.
Les Kia-yu, comme leur nom l'indique, sont une série de dialogues ou discours, dans lesquels Kong-tze répond aux questions que lui adressent ses disciples, ou bien quelques princes ou
grands personnages des États feudataires. Les sujets en question sont des plus variés : rites, gouvernement, lois pénales, lettres, sacrifices, principes moraux, disciples du sage. Quelques-uns,
spécialement les deux premiers, relatent des faits de la vie du héros du livre.
L'édition de Kien-long contient environ 300 récits. Les uns se composent d'entretiens du Philosophe ou d'actes de sa vie ; les autres relatent des faits étrangers à ses faits et gestes et sur
lesquels il prononce un jugement de blâme ou d'approbation. Il en est spécialement ainsi du chapitre XI. Comme cette édition présente des caractères internes d'authenticité qui la mettent
beaucoup au-dessus de la seconde, nous nous y sommes tenus généralement sans nous interdire toute correction empruntée au texte de Tao-kuang. Parfois même cela devenait nécessaire par suite de
l'effacement de caractères ou des fautes d'impression incontestables.
Les commentaires des Kia-yu sont peu nombreux.
Plath et Wylie ne citent que celui de Wang-su. Ma-tuan-lin n'en mentionne pas d'autres expressément. Je ne connais, outre l'œuvre de Wang-su, que les commentaires de Lu-wen-tchao et de
Ho-meng-tchun des Mings. Ceux-ci résolvent beaucoup de difficultés et donnent de précieux renseignements sur les hommes et les choses. Ils laissent toutefois encore bien des points obscurs.
Les mots Kia-yu ont été traduits par les uns « discours familiers » (familiar sayings), par d'autres : discours de l'école (philosophique) (sayings of the school). Kia a ces deux
significations. Mais il ne peut être ici question d'« entretiens dans la famille ». Hausgepräche « entretiens domestiques », comme traduit Plath, est encore moins exact. Kong-tze enseigne chez
lui, chez ses disciples, dans les palais des grands, et même à la cour des princes.
Le sens le plus admissible est donc « Entretiens familiers ». Kong-tze s'entretient familièrement avec ses interlocuteurs.
Quelques chapitres, et spécialement les deux premiers, ont un caractère tout particulier et semblent appartenir à un autre genre d'ouvrage. Ou dirait qu'ils ont été ajoutés, ainsi que d'autres,
au fonds primitif portant déjà le nom de Kia-yu. C'est ainsi que ce titre ne répond que partiellement à la nature de l'ouvrage lui-même.
Les chapitres d'origine taosséique, tel que le septième, peuvent avoir été ajoutés subrepticement de la même façon à un premier choix de morceaux confucéens.
1. La première fois que Kong-tze prit une fonction, il fut préfet de Tchong-tou. En cette charge, il fit une loi du devoir d'entretenir les
vivants et d'honorer les morts. Il régla les différentes manières d'entretenir les gens âgés et les jeunes gens, de traiter les forts et les faibles, les places distinctes données aux garçons et
aux filles. Il défendit de s'emparer des objets perdus sur un chemin ; il proscrivit toute tromperie, toute surcharge du prix des marchandises. Il ordonna de faire des cercueils de bois épais de
quatre pouces pour l'intérieur et de 5 pouces pour l'extérieur, d'enterrer sur les collines, sans élever de tertre ou planter des arbres autour.
Il pratiqua ces règles pendant un an et tous les princes souverains de la région de l'ouest imitèrent sa conduite.
2. Le Prince Ting demandait un jour à Kong-tze comment un lettré pourrait gouverner l'État de Lou conformément à ces principes. Le sage répondit :
— Puisqu'il peut gouverner aussi l'empire entier, à plus forte raison le pays de Lou tout seul.
Deux ans après son entrée en fonction, le prince Ting fit Kong-tze ministre des Travaux Publics. Il divisa le pays en cinq sections d'après la nature du sol de chacune d'elle et leurs propriétés
pour (l'entretien) des animaux auxquels elles donnent naissance.
3. Précédemment Ki-shi avait enterré le prince Tchao auprès du chemin du cimetière princier. Kong-tze devenu ministre des Travaux Publics fit faire un fossé derrière cette tombe isolée pour la
réunir aux autres. À cette occasion il dit à Ki-san-tze :
— Blâmer ainsi son prince par ses actes pour s'élever soi-même (en montrant son pouvoir) c'est contraire aux principes, c'est un crime.
En faisant cette réunion de sa propre main, l'acte du Maître ne fut pas celui d'un sujet. C'est pourquoi le ministre des Travaux devint le Grand ministre de la Justice de Lou. Il fit des lois et
n'employa pas les pervers.
4. La 16e année de son règne, le prince Ting de Lou eut une entrevue avec le marquis de Tsi pour conclure un traité. Ils se rencontrèrent à Kia-ko.
Kong-tze y vint en qualité d'assistant de son prince. Un jour il lui avait dit :
— C'est un principe connu, celui qui a l'administration civile doit avoir celle de la guerre et celui qui est à la tête de l'armée doit connaître les affaires civiles. Quand les princes
précédents se rencontraient en dehors de leurs frontières, ils se faisaient suivre de leurs ministres et accompagner par leurs généraux. Vous devriez en faire autant.
Le prince approuva et suivit ce conseil.
Au lieu du meeting s'élevait un autel sur le sol plan, trois marches conduisaient à la plate-forme. Les deux princes se placèrent vis-à-vis l'un de l'autre, puis montèrent à l'autel pour faire
les offrandes et boire à la santé l'un de l'autre.
Cela fait, le prince de Tsi fit aller des soldats de Lai courir en armes en battant le tambour pour répandre la confusion, et se jeter sur le Marquis de Lou pour le frapper. Voyant cela Kong-tze
se précipite sur l'autel, en arrache son prince en criant aux soldats :
— Comment osez-vous le faire attaquer par vos satellites ? Nos princes sont amis et vous oseriez les troubler par vos armes, vous esclaves, vous barbares des frontières ? Le Marquis de Tsi n'a
point à commander aux autres princes, ni les étrangers à conspirer contre Hia, ni à des barbares à troubler le Pays des Fleurs. Des captifs qui troublent un accord ! Les armes ne peuvent inspirer
l'amitié. Devant les esprits garants du traité, elles sont fatales. Parmi les hommes c'est violer la justice, c'est manquer aux lois. C'est indigne d'un prince.
Le marquis de Tsi honteux, donna un signal et fit retirer (ses satellites).
Peu après la musique du palais fut appelée pour jouer et l'on donna une représentation théâtrale.
Un nain hideux apparut sur la scène et y fit des gestes insolents. Kong-tze s'élança sur le théâtre et à peine sur la première marche il cria :
— Un bouffon insulte et provoque les princes ; c'est un crime qui mérite un châtiment rigoureux.
Aussi il requit du ministre des Armes de hâter et multiplier ses supplices. Le bouffon eut les pieds et les mains coupés et le prince de Tsi effrayé, rougit de honte (et n'osa s'y opposer).
On en vint au serment. On apporta la formule écrite ; le peuple de Tsi y avait ajouté ces mots : Jurez que si l'armée de Tsi passe ses frontières pour faire la guerre, vous lui donnerez trois
cents chariots de guerre auxiliaires. Si vous ne nous aidez pas de cette façon, que les calamités fondent sur vous.
(Apprenant cela) Kong-tze envoya un ta-fou dire : Et vous, si vous ne nous rendez pas le pays au nord du Wen quand nous nous conformerons à vos ordres, que les mêmes malheurs vous
accablent.
Le prince de Tsi voulut alors donner un festin au marquis de Lou. Kong-tze l'apprit et dit aussitôt à Liang-kiu :
— Ne savez-vous plus les règles anciennes des rapports entre Tsi et Lou ? Maintenant notre besogne est finie avec le serment. Donner une fête c'est tracasser inutilement les officiers des cours.
Nos vases cérémoniels ne peuvent d'ailleurs point passer les frontières. Nos instruments de musique ne conviennent pas à ces contrées désertes où nous sommes. Donner une fête et les faire venir à
cette fin, c'est détruire les rites et la donner sans eux c'est comme servir à cette fête de la paille et des herbes. En un semblable banquet nos princes se couvriraient de honte et par cette
violation des rites notre renommée se détruirait. Pensez-y bien. Un banquet doit mettre en évidence les vertus de celui qui le donne. Autrement ce n'est point un vrai banquet digne de ce
nom.
5. Le prince de Tsi retourna à sa cour ; (rentré en son palais) il adressa ces reproches à ses officiers :
— À Lou, on aide le maître par les principes de la sagesse. Ici vous ne savez qu'enseigner les principes des barbares. Malheureux que je suis ! on m'entraîne dans les crimes. Là-dessus, il
ordonna de rendre au prince de Lou les quatre villes et le territoire du nord du Wen qui lui avaient été enlevés.
6. Kong-tze dit un jour au prince Ting :
— Les grandes familles d'un État ne doivent pas avoir des magasins d'armes, ni de forteresses dont les murs ont cent embrasures. Mais les trois grandes familles (qui dominent Lou) se sont mises
au-dessus des lois ; il faut les abaisser et charger Tcheng-yeu, l'intendant des Ki, de démanteler les citadelles.
(La chose alla d'abord sans difficulté.) Mais un grand du nom de Shu-sun ne voulut pas se rendre aux exhortations du chef des Ki et envoya son intendant avec des soldats de Pi, attaquer son
souverain. Kong-tze conduisit ce dernier suivi de Ki-sun, Shu-sun et Meng-sun dans la citadelle de Ki, et les fit monter sur la tour de Wu-tze. Les assaillants pénétrèrent jusqu'à la tour ; mais
Kong-tze envoya Shin-keu-seu et Yo-ki pour entraîner les soldats, descendre et attaquer avec vigueur. Les gens de Pi tournèrent le dos et s'enfuirent.
(Vainqueur, le prince de Lou) fit démanteler les forteresses. Ainsi Kong-tze fortifia le pouvoir du souverain et affaiblit celui des grands. Il éleva le prince et abaissa les ministres. Ainsi
l'ordre gouvernemental se rétablit et régna fortement.
Tchao, roi de Tchou, avait envoyé un ambassadeur inviter Kong-tze à sa cour ; celui-ci alla au-devant de lui pour le saluer et lui faire ses
hommages. Chemin faisant, il passa par le pays de Tchen et Tsai.
Les grands et ministres de Tchen et Tsai se réunirent pour délibérer et se dirent : Kong-tze est un saint et un sage. Tout ce qu'il conseille, tourne à bien pour les princes ; s'il se met au
service de Tchou, nos États seront fort en danger. Depuis longtemps ce que les grands de Tchen-tsai décident est contraire à sa pensée. Tchou est un grand royaume et cependant son prince vient
recevoir Kong-tze ; s'il le gagne à son service, Tcheng-tsai servira et les grands y seront tous en grand danger.
Pour y parer, on fit cerner Kong-tze dans la campagne par des hommes d'armes, en sorte qu'il ne pût s'échapper. Il n'avait que des provisions insuffisantes ; elles étaient interceptées. Pas
d'issue ; impossible de se procurer du riz, des soupes, sept jours durant. Ses disciples qui l'accompagnaient, tombèrent malades. La grande âme de Kong-tze, de plus en plus ferme, ne se laissa
point abattre ; il causait, chantait et jouait du kin. Mais voyant la mine défaite de ses disciples, il appela Tze-lou et lui dit :
— Le Shi porte : « Nous ne sommes ni des rhinocéros, ni des tigres, et nous sommes menés dans cet affreux désert. » Ce qui est à faire, m'échappe. Comment en sommes-nous venus là ?
Tze-lou, rouge de colère, se contraignit et dit :
— Le kiun-tze est sans abattement. Je ne puis croire que mon Maître n'ait pas été bon pour les gens, qu'il ne soit pas aimé d'eux. Je ne puis penser qu'il n'ait pas su être sage dans ses rapports
avec eux.
J'ai entendu cent fois notre Maître dire : Celui qui fait le bien, le ciel le récompense par les prospérités ; celui qui fait le mal, le ciel le rétribue par des calamités. Maintenant le Maître a
accumulé en lui les vertus, il a embrassé la justice, et la pratique depuis longtemps. Comment donc est-il tombé dans cette extrémité ?
Kong-tze reprit :
— Yeu, vous n'avez pas bien compris la chose. Comme je vous l'ai dit, si l'on donnait toujours sa confiance en ceux que l'on juge d'une bonté parfaite, Pe-i et Shu-tsi ne seraient pas morts de
faim au mont Sheou-yang. Si ceux que l'on juge sages étaient toujours employés, le Wang-tze, Pi-kan n'aurait pas eu le cœur ouvert. Si tous ceux que l'on estime fidèles étaient toujours
récompensés, Kuan-long-fong n'aurait point vu les supplices. Si ceux que l'on estime de bon conseil étaient toujours écoutés, Wou-tze-seou n'aurait pas vu la mort. Que l'on réussisse ou pas,
c'est l'occasion qui en est cause. Ce qui fait le sage et l'incapable, c'est la capacité. Le sage, le kiun-tze étend son instruction et approfondit les conseils, et cependant manque (parfois
l'occasion) ; ceux qui manquent le temps sont nombreux.
Comment Kieou seul (échapperait-il à cette condition de l'humanité ?)
Le coriandre, l'aglaé naissent dans la profondeur des forêts ; mais malgré l'absence des hommes, ces fleurs n'en ont pas moins de parfum.
Le kiun-tze observe le tao et rend la vertu parfaite en lui ; mais pour éviter le malheur, la pauvreté, il ne change point de ligne de conduite. Les actes, leurs qualités dépendent de l'homme ;
la naissance et la mort tiennent de l'ordre céleste.
C'est ainsi que le prince de Tsin Tchong-er eut le cœur irrité et projeta la vengeance à Tsao et Wei. Il en fut de même de Sun-tsien, roi de Yue à Hoei-ki, de Siao-pe de Tsi à Ken.
Ainsi quand on est dans un État inférieur et sans affliction, la pensée ne s'étend pas au loin ; quand on est miséreux et qu'on se livre à l'oisiveté, la volonté, la pensée ne s'élargit pas. Qui
peut prévoir la fin des aventures, l'issue des épreuves ?
Là-dessus Tze-Lou s'en alla appeler Tze-kong. Le Maître lui répéta ces paroles. Tze-kong, entendant cela, s'écria :
— La doctrine du Maître est vraiment d'une grande élévation. Le monde n'est point capable de supporter notre Maître, qui en montre toute la bassesse.
Kong-tze, à ces paroles, reprit :
— Le bon agriculteur peut semer, mais il ne dépend pas de lui de récolter. L'artiste habile peut exercer son art, mais il ne peut suivre les idées des hommes.
Le kiun-tze peut cultiver ses principes, il peut poser les fils et les mettre en ordre dans son tissu ; mais les tenir en ordre et bien réglés, c'est ce qu'il ne peut assumer sur soi.
Maintenant vous ne savez pas pratiquer votre doctrine et vous cherchez à être capable. Tze votre pensée est bien étroite. Vous ne savez pas porter vos vues au loin.
Tze-kong partit là-dessus et Yen-hoei arriva à son tour. Kong-tze lui tint le même langage qu'aux deux autres. Yen-yuen s'exclama comme Tze-kong et ajouta :
— Malgré cela, notre Maître a su pratiquer cette doctrine.
Cette incapacité, quel malheur ! et malgré cela on paraît un kiun-tze. Que cette doctrine ne soit pas cultivée, c'est ce que je déteste. Cette doctrine parfait la personne ; qu'en ce temps nous
ne sachions pas la mettre en pratique, c'est la honte d'un État. Qu'on ne la partage pas, quelle douleur pour notre Maître !
Kong-tze entendant ces ardentes paroles, fut satisfait et répondit en souriant :
— C'est bien ainsi. La descendance des Yeu a fait de vous un homme à grande ressource, moi je serai votre intendant.
Après cet entretien Kong-tze envoya Tze-kong à Tchou (avertir le roi de ce pays de sa situation). Le roi Tchao arriva aussitôt avec des soldats et ainsi Kong-tze put échapper au péril.
2. Lorsque Kong-tze fut en péril entre Tsai et Tchen, il fut privé de nourriture pendant sept jours ; ses disciples étaient malades de faim. Pour lui il jouait du kin et chantait.
Tze-lou étant venu près de lui, lui dit :
— Ces chants du Maître sont-ils bien convenables ?
Kong-tze ne répondit pas d'abord, mais quand il eut achevé sa strophe, il dit :
— Yen, venez, je vous le dirai. Quand l'homme supérieur aime la musique, il est sans orgueil ; l'homme vulgaire qui s'y plaît n'est point peureux. Qui sait cela ? Seigneur, vous êtes-vous attaché
à moi, sans me connaître ?
Tze-lou, peu satisfait de ces paroles, prit sa hache et se mit à danser. Après trois mouvements, il s'en alla et Kong-tze continua à faire de la musique pendant les sept jours, sans cesser.
Tze-lou finit par s'irriter et vint le trouver pour lui dire :
— Est ce bien là le temps de faire de la musique ?
Kong-tze continua ; puis quand son air fut joué, il lui répondit :
— Yen, je vous ai dit précédemment que Huan de Tsi eut le cœur ému et irrité à Keu, Keu-tsien à Tsang-ki et Weu de Tsin contre les Li. Celui qui ne vit point dans l'obscurité, ne pense pas au
loin ; celui qui n'est point éprouvé, n'a qu'une sagesse bien étroite. Quand on sait cela, comment n'atteint-on pas à cette sagesse ?
Et là-dessus, il se leva. Le lendemain matin, il fut tiré de cette position périlleuse. Tze-kong prit alors les rênes du char et dit :
— Nous, disciples de Kong-tze, c'est en suivant notre maître que nous sommes tombés dans ce péril ; nous ne l'oublierons jamais.
Kong-tze répliqua :
— Comment pouvez-vous parler ainsi ? Un proverbe le dit : Que l'on se casse trois fois l'avant-bras, un habile médecin répare ce mal. Ce qui est arrivé entre Tchen et Tsai est l'effet de la bonne
fortune de Kong-tze, et ses disciples qui l'y ont suivi sont d'heureuses gens. Je l'ai entendu dire : un prince qui n'a pas été dans la détresse, n'est pas un souverain accompli. Un homme
distingué qui n'a point connu le malheur, n'a point une vie achevée ; sa conduite n'atteint point la perfection. (Les plus grands princes ont connu le malheur.) Tang a été dans la détresse à la
Tour des Hia ; Wen-wang a été prisonnier à Yeu li et Mou, prince de Tsai, à Hiao. Huan de Ts'i fut dans l'angoisse à Tchang-tcho.
Ainsi les malheurs, les détresses arrivent de l'hiver à l'été et des temps chauds aux froids. Le sage seul comprend cela, mais l'explique difficilement. Le Yi dit : dans la détresse, succès et
raffermissement. L'homme vraiment grand est heureux et sans remords ; il ne se fie pas aux bruits qui courent. Le saint a difficilement confiance dans les hommes. Dans ma situation critique entre
Tchen et Tsai avec mes quelques disciples, j'ai commencé à apprendre qu'ils manquaient de zèle et de force d'âme. Cela donna lieu à des pensées pénibles.
Le duc Gai de Lou demanda à Kong-tze : Quel rapport y a-t-il entre le ming (destin) et la nature ?
Kong-tze répondit :
— Ce qui est distribué pour la conduite, les actes de la vie, s'appelle le destin, l'ordonnance (céleste). Ce qui se forme en un être particulier, est la nature.
Se transformer par le Yin et le Yang, prendre forme et se produire au dehors, c'est ce qu'on appelle naître.
Se modifier, s'affaiblir et s'épuiser complètement, c'est mourir. Ainsi le destin est le principe de la nature, la mort est la fin de la vie. Quand il y a commencement, il doit y avoir fin.
L'homme naissant peut avoir cinq défauts qui le rendent incomplet : être aveugle, ne pouvoir manger, ne pouvoir marcher, ne pouvoir parler, ne pouvoir se former.
Quand l'homme est né, il reste trois mois les prunelles immobiles et comme dérobées. Après cela il peut voir. À huit mois il pousse des dents et peut manger. À un an les mâchoires se joignent et
il sait marcher. À trois ans son crâne se joint et il peut parler. À seize ans l'élément vital a pénétré partout et pris toute son extension, il peut se former complètement.
Le Yin s'épuisant retourne au Yang ; ainsi par le Yin, le Yang se modifie. Le Yang épuisé retourne au Yin et par le Yang le Yin se transforme en se renforçant.
Ainsi les garçons, à huit mois, font leurs dents ; à huit ans perdent les dents de lait pour en faire d'autres ; à deux fois huit ou seize ans ils se forment en hommes faits. Les filles ont tout
cela à 7 mois, à 7 et 14 ans.
Ainsi un Yin et un Yang, un impair et un pair s'associent, se combinent (en succession perpétuelle). Leur mode d'action subséquente est une combinaison harmonique, une modification qui amène à
leur perfection, l'achèvement de l'être. Le principe de son destin et de sa nature prend une existence propre et sensible de cette manière.
Le duc Gai :
— D'après les rites, les garçons forment une maison (se marient et tiennent maison) à trente ans. Les filles à 20 ans ont un époux. Pourquoi ne peut-on manquer à cette règle ?
Kong-tze :
— Ce précepte des rites est ce qui en est de plus élevé ; on ne peut donc s'y soustraire Les garçons à 20 ans prennent le bonnet viril. C'est ce qui les constitue hommes faits et capables d'être
père.
Les filles, à 15 ans, sont déjà aptes au mariage ; on peut les conduire à la demeure d'un époux.
Tout qui naît accumule en soi le Yin ; c'est le principe de son développement et de son perfectionnement. Aussi les saints suivent le temps convenable pour unir les garçons et les filles par le
mariage, et pour cela ils observent avec le plus grand soin les nombres du ciel.
Quand le soleil arrive au Scorpion et que les travaux des femmes mariées sont achevés, le mariage a lieu.
Quand la glace se défait, commencent la culture des champs et l'élevage des vers à soie. Les rites du mariage naissent et meurent de là.
L'homme est (à la place) dans la voie du ciel pour faire croître toute chose. Ainsi il élucide les principes des relations humaines établies par le ciel et fait connaître les distinctions qui en
proviennent. La femme suit les instructions de l'homme et fait croître l'élément (produit par l'homme). Aussi ne doit-elle point s'appliquer aux principes des décisions. Elle a trois principes de
soumission (trois supérieurs auxquels elle doit se soumettre selon les circonstances). Enfant, elle obéit à son père, ou à son frère aîné (s'ils sont orphelins de père). Mariée, elle obéit à son
époux. Veuve, elle obéit à son fils aîné. On dit qu'elle ne doit pas boire deux fois le vin des noces.
Ses volontés, ses ordres ne sortent pas de la porte des appartements intérieurs. Ses occupations consistent à préparer les aliments et les boissons ; c'est là tout ; son assentiment ou son blâme
ne passent pas le seuil de la porte de son quartier.
Il y a sept causes de divorce et trois motifs de ne point répudier.
Les sept premières sont : 1° ne point obéir aux père et mère (du mari) ; 2° être sans enfants ; 3° la conduite impudique ; 4° la jalousie ; 5° une mauvaise maladie ; 6° la trop grande loquacité ;
7° le vol.
Ne point obéir aux père et mère, c'est ruiner la vertu. Être sans enfant, interrompt la descendance. L'inconduite trouble la famille, et la jalousie, le ménage. Une mauvaise maladie fait que
l'union sexuelle ne peut s'accomplir. Le trop grand bavardage trouble l'affection et le vol viole la justice.
Les trois motifs qui défendent de congédier une épouse sont aux cas suivants : 1° Quand, tenue auparavant, elle n'a plus personne chez qui elle puisse retourner ; 2° quand on a porté ensemble le
deuil de trois ans ; 3° quand on l'a épousée pauvre et de basse naissance et qu'elle est devenue riche et élevée. C'est ainsi que les Saints favorisent l'union des hommes et des femmes et donnent
tout soin et toute importance au principe du mariage.
Kong-tze était à Wei lorsqu'il apprit que Tien-tchang (grand de Tsi, chef de la famille Tchên) voulait susciter des troubles, mais que craignant
(l'opposition de) quatre grands du même État il songeait à changer la direction de ses armes et attaquer Lou. Kong-tze l'ayant appris réunit ses disciples et le leur annonça en disant :
— C'est l'État de mes père et mère où sont leurs tombeaux ; nous devons le sauver. Je m'abaisserai devant Tien-tchang pour sauver Lou. Qui de mes disciples sera mon envoyé ?
Tze-lou voulait partir pour cette mission ; mais Kong-tze l'arrêta. Tze-tchang et Tze-shi en firent autant, mais Kong-tze ne consentit point. Tze-kong le demanda à son tour et le Maître y
consentit.
Tze-kong partit donc, alla à Tsi, parler à Tien-tchang et lui dit :
— Lou est un État difficile à combattre ; et mon prince, s'il l'attaquait, commettrait une faute. Il vaut bien mieux de porter ses armes contre Wou.
Tien-tchang ne fut point satisfait (de ce conseil). Tze-kong reprit :
— Les soucis qui se retiennent à l'intérieur assaillent le fort ; ceux qui se manifestent à l'extérieur assaillent le faible. J'ai appris que mon Maître avait reçu 3 fois un fief et les trois
fois on n'avait point mené les projets à fin. Mais comme le premier ministre n'a point acquis de renommée ; maintenant il veut par les combats et la victoire enorgueillir le prince, détruire un
État (Lou) afin de rendre ses ministres dignes d'honneur sans que les mérites de mon Maître y prennent part ; celui-ci devra prochainement recourir au prince et lutter contre Pao et Yan ; sa
position sera en péril.
— C'est bien, repartit Tien-tchang ; cependant la guerre finie j'ajouterai (l'expédition contre) Lou, je n'y puis rien changer. Cela fait, je marcherai contre Wou, comment le ministre pourrait-il
me suspecter ?
Tze-kong répliqua :
— Si vous retardez l'expédition (contre Wou) je désire aller voir le roi de ce pays et lui demander de sauver Lou. Il sauvera Lou et attaquera Tsi et vous devrez venir à l'encontre avec vos
troupes.
Tien-tchang acquiesça. Tze-kong s'en alla au midi voir le roi de Wou et lui dit :
— Le roi n'extermine point les États (dangereux) ; le Pa est sans ennemi puissant. Maintenant avec Tsi et ses 10.000 chars, s'appropriant Lou aux mille chars, (le roi de Tsi) sera d'une force
terrible pour lutter contre Wou. Ayez-en grand souci pour Votre Majesté. Mais si elle sauve Lou, elle illustrera son nom. Attaquer Tsi est très utile pour elle ; ayant pris possession (du fleuve)
du Ssa, elle dominera tous les princes. Abattre le cruel Tsi pour servir le puissant Tsin n'est pas d'un grand avantage. Ce qui est glorieux, c'est de raffermir Lou périssant et abaisser le
puissant Tsi. Les Sages n'en doutent point.
— C'est bien, répondit le roi. Mais j'ai combattu Yue et je l'ai vaincu à Hoei-ki. Maintenant le roi de Yue s'efforce d'entretenir une armée. Il a à cœur de se venger de Wou. Attendez.
J'attaquerai Yue, après quoi cela se pourra faire.
Tze-kong répliqua :
— La puissance de Lou ne dépasse pas celle de Yue, ni la force de Wou celle de Tsi. Si Votre Majesté affermit Tsi en attaquant Yue, Tsi s'appropriera Lou. Par la puissance de Votre Majesté
rétablir les (États) périssants, renouer le fil coupé (des existences), cela est glorieux.
« Attaquer le faible Yue, et redouter le puissant Tsi, ce n'est pas courageux. Le brave n'évite pas les difficultés, l'homme bon n'épuise pas le pauvre ; le sage ne perd pas le temps, le juste ne
coupe pas les existences. Or affermir Yue, c'est témoigner à tous les princes de sa bonté (en épargnant le faible). Sauver Lou, attaquer Tsi, abattre Tsin toujours croissant (fera que) tous les
princes viendront (vous) aider et (vous) faire la cour et le pouvoir du Pa sera affermi, complet.
« Puisque Votre Majesté craint Yue, votre sujet demande d'aller à l'est voir son roi et lui enjoindre de se mettre en campagne pour seconder ce projet ; ainsi vraiment vous frapperez Yue et la
gloire vous suivra. Les princes ainsi combattront Yue.
Le roi de Wou fut charmé de cette proposition et envoya Tze-kong à Yue. Là le roi alla à sa rencontre au faubourg et le conduisit lui-même à son hôtel. Il lui demanda :
— Ce royaume est un État barbare ; comment un haut magistrat (chinois) vient-il l'honorer et se déshonorer (par sa visite) ?
Tze-kong répondit :
— Je viens de parler au roi de Wou de sauver Lou et d'attaquer Tsi ; c'est là l'intention de son esprit ; mais son cœur craint Yue. Si vous n'avez pas le dessein de vous venger et qu'on le
soupçonne, c'est maladroit. Si vous l'avez et que vous le fassiez savoir c'est dangereux. Qu'on apprenne un projet avant qu'il soit exécuté c'est un danger. Ces trois choses sont des sujets
d'anxiété pour toute entreprise.
Le roi de Yue courba la tête jusqu'au sol et dit :
— Pauvre orphelin j'ai, sans estimer les forces, excité Wou ; c'est très difficile, j'ai été comme prisonnier à Hoei-ki. L'anxiété me pénètre tout entier jour et nuit. Mes lèvres brûlantes, ma
langue desséchée sont les conséquences de mon désir d'obtenir un accord avec le roi de Wou et de mourir ; c'est l'aspiration de (moi) l'orphelin. Maintenant que le Haut Magistrat m'enseigne ce
qui est utile ou nuisible.
Tze-kong répondit :
— Le roi de Wou est un homme dur et cruel ; ses officiers sont des incapables ; l'État est ruiné ; le peuple hait ses chefs ; le premier ministre a le cœur éloigné de son maître (changé) ;
Tze-sin (son ministre) est mort pour avoir fait des représentations. Son grand intendant Ki est occupé par des entreprises et partage les fautes de son prince dans son intérêt privé. C'est le
moment de vous venger de Wou.
« Que le roi songe à lever des troupes et seconder les événements pour atteindre son but. Qu'il augmente ses richesses pour réjouir son cœur et diminue les discours pour faire honneur aux règles
des rites ; alors l'attaque de Tsi sera nécessaire. C'est ce que le Saint appelle s'abaisser, chercher ce qu'il peut pénétrer. Cette lutte ne dépasse pas les ressources de votre royauté. Si elle
triomphe il faudra attaquer Tsin par les armes.
« Votre sujet demande d'aller au nord voir le prince de Tsin pour lui persuader par ses insistances qu'il doit affaiblir Wou. Cet État ayant ses armes si minces, épuisées par Tsi, Tchang-kia (roi
de Tchao) étant prisonnier à Tsin, le pouvoir du roi étant abattu, Tsin détruira Wou.
Le roi de Yue fut très réjoui de cette proposition et y acquiesça. Tze-kong s'en retourna (à Wou). Cinq jours après le roi de Yue envoya le ta-fou Wen-tchong s'incliner devant le roi de Wou et
lui dire :
— Yue a dans ses frontières 3.000 hommes prêts à servir votre royaume.
Le roi de Wou dit alors à Tze-kong :
— Le roi de Yue désire servir ma petitesse. Cela se peut-il ?
Tze-kong répondit :
— Que tous les hommes servent leur chef, n'est-ce point justice ?
Le roi de Wou accepta donc les troupes du roi de Yue et le remercia ; il leva lui-même les troupes de ses États pour faire la guerre à Tsi qu'il défit complètement. Tze-kong alors se rendit
auprès du roi de Tsin et lui persuada de déclarer la guerre à Wou.
Tsin approuva cet avis et Tze-kong se retira pour s'en retourner à Lou.
Le roi de Wou livra bataille aux gens de Tsi près de Gai-ling et défit complètement ses adversaires ; sept corps d'armées furent faits prisonniers et ne retournèrent plus en leur patrie.
Après cette victoire le roi de Wou porta ses armes contre Tsin. Les deux armées se rencontrèrent sur les hauteurs de Hoang-tchi. La bataille fut des plus acharnées. Tsin l'emporta finalement et
infligea une défaite sanglante à l'armée de Wou.
Vu cet événement le roi de Yue passa le Kiang pour surprendre Wou. Il porta son armée à 7 lis de la capitale. Wou apprenant cette nouvelle abandonna le pays de Tsin et retourna au secours de sa
ville royale. Trois batailles furent livrées successivement à Wu-hu et le roi de Wou fut défait. Les portes de sa capitale n'étant point gardées, le roi de Yue y entra, assiégea son adversaire
dans son palais et l'y tua ainsi que ses aides de camp. Ainsi il détruisit Wou. Trois ans après le roi de Yue acquit l'hégémonie des pays de l'Est.
Ainsi Tze-kong en une mission affermit Lou, ébranla Tsi, perdit Wou, fortifia Tsin et donna l'hégémonie à Yue. En dix ans, cinq royaumes furent ainsi diversement transformés. Kong-tze dit de ces
événements : Ébranler Tsi et raffermir Lou c'était mon premier désir. Fortifier Tsin, en perdant Wou, faire périr cet État en donnant la suprématie à Yue c'est l'éloquence de Tze-kong (qui opéra
ces grandes choses). L'habileté de la parole détruit la droiture et le langage sincère et juste.
Wen-tze, tsiang-kiun de Wei demanda à Tze-kong :
— J'ai entendu dire que Kong-tze dans ses leçons commençait par le Shi et le Shu, continuait en enseignant la piété filiale et fraternelle, entretenait ses disciples de la bonté et de la justice,
les faisait paraître par les rites et la musique et achevait leur formation par la littérature et la vertu. Ceux qui chez lui montèrent à la grande salle et entrèrent aux appartements intimes
furent plus de septante. Qui est sage selon lui ? Quel fut le plus sage d'entre eux ?
Tze-kong répondit qu'il n'en savait rien.
Wen-tze reprit :
— Je voudrais vous demander quelle était leur conduite.
Tze-kong continua :
— Se lever tout au matin et se coucher à la nuit, s'appliquer à la lecture, observer parfaitement les rites, ne commettre pas deux fois la même faute, ne faillir point dans ses discours, ce fut
la conduite de Hoei.
Celui qui ayant eu l'heureuse chance de rencontrer un prince plein de vertu, qui eut un destin illustre et ne perdit point sa renommée, qui traita le pauvre avec soin, comme un hôte, qui
commandait à ses officiers comme s'ils lui prêtaient volontairement leur ministère, qui ne laissa point sa colère agir au dehors et n'eut point de ressentiment profond et qui ne rappelait pas les
fautes anciennes, celui-là ce fut Yen-yong.
Ne point craindre les oppositions violentes, ne point mépriser l'homme digne de pitié, le misérable ; parler toujours selon sa nature, ses dispositions ; par ses facultés, sa position, gouverner
les hommes d'armes, c'est le propre de Tchong-yeou.
Kong-tze voulait calmer son tempérament par l'étude des lettres, mais il avait le naturel porté fortement à la carrière militaire. Les lettres ne pouvaient dominer son essence.
Respecter les vieillards, avoir soin de la jeunesse, ne point négliger ses hôtes, les étrangers, aimer l'instruction, favoriser les arts, considérer dûment toute chose et agir toujours avec zèle,
c'est ce que fit Yen-keu.
Kong-tze disait de lui : « Quand on aime à s'instruire on devient savant. Quand on s'occupe avec bienveillance de la jeunesse on devient charitable. Respectueux on se tient aux rites ; zélé on
continue heureusement, avec succès. »
Pur et fort, aux pensées profondes, comprenant et aimant les rites, sachant seconder les intérêts de deux princes, droit noble et toujours mesuré, tel fut Kong-ssi-yi ; c'est ainsi qu'il agit
toujours.
« Celui de mes disciples, disait Kong-tze, qui désira le mieux connaître les rites de la réception des hôtes, ce fut Yé. »
Être plein et comme ne contenant rien, surabondant et comme vide, dépassant les autres et comme ne pouvant atteindre leur vertu ; parlant aux hommes et méritant toujours leur confiance, lui-même
au rang élevé et toujours généreux, tel était Tseng-san.
« L'instruction est le commencement de la vertu ; l'amour fraternel est sa conséquence première ; la droiture est son extension ; la sincérité, sa règle. San a pratiqué ces quatre vertus »,
disait Kong-tze.
Noble et plein de mérites, n'attaquant point les grands, partant sans injure ; ne cherchant point la joie, partant sans oisiveté, ne faisant tort à personne, p.062 n'opprimant pas les abandonnés
sans recours, tel fut Twan-sun-tze.
Kong-tze dit : « Celui qui ne nuit à personne, peut réussir ; qui ne nuit à personne du peuple est vraiment bon, humain. Celui dont le maître estime la bonté, comme la base profonde des sciences
supérieures, celui qui sait honorer les chefs par ses prévenances, qui dans ses rapports avec ses inférieurs sait observer les distinctions nécessaires, traiter selon les rangs distincts, c'est
Pu-shang, (c'est sa conduite). »
Ne point se réjouir de sa grandeur, ni s'affliger de son infériorité, être utile à tout le monde, désintéressé en ce qui concerne sa propre personne, c'est ce que sut être Tan-tai-ming.
Bien méditer toute affaire avant d'agir et appliquer ses réflexions, ne rien négliger quand une raison grave porte à agir, telle fut la conduite de Yen-yeu.
Étant seul sans affaire, penser à être bon, ayant à décider d'une cause, ne prononcer que selon le droit, en un seul jour répéter trois fois le Pe-kuei du Shi-king, c'est ce que fit
Nan-kong-tao.
Celui en qui Kong-tze avait la confiance, que ses capacités, sa bonté le mettraient au dessus de tous les autres lettrés, qui depuis qu'il avait vu Kong-tze ne foulait plus jamais avec
précipitation le seuil d'une porte, qui dans ses allées et venues ne marchait plus sur une ombre, qui évitait d'écraser un ver, une chrysalide, ou de couper une branche poussante, qui pleura
trois ans la mort de ses parents sans laisser voir ses dents une seule fois, ce fut Kao-tchai.
Telles sont les qualités que le Maître attribuait à chacun de ces lettrés, telles qu'il les avait observées lui-même. Il les avait étudiées grâce à ses dons supérieurs, mais il ne les
reconnaissait point pour cela comme des sages.
1. Yen-hoei était de Lou ; son nom d'adulte était Tze-yuen. Il était 30 ans plus jeune que Kong-tze. À vingt-neuf ans, ses cheveux étaient déjà
blanchis ; il mourut à 32 ans.
Célèbre par ses vertus ; Kong-tze vantait sa bonté et disait que depuis qu'il était à son école, ses disciples grandissaient chaque jour en sagesse et en affection.
2. Min-sun, de Lou, au nom d'adulte de Tze-kieou. 15 ans plus jeune que Kong-tze également célèbre, Kong-tze vantait sa piété filiale.
3. Jan-yen (ou Jan-keng) de Lou, au nom d'adulte de Pe-nin, de même renommée. Il tomba gravement malade ; c'est le destin, hélas ! dit Kong-tze. Il était attaché aux doctrines des anciens
lettrés, dit Hoei-nan-tze.
4. Jan-yung, appelé Tchong-kong ; de la même famille que Jan-yen. Né d'un père indigne ; 29 ans plus jeune que Kong-tze ; célèbre par ses vertus. Kong-tze disait qu'il pourrait être roi.
5. Tsai-yu, appelé Tze-yeou ou Tze-go, de Lou ; doué d'une grande éloquence, célèbre par ses discours. Il fut ta-fou de l'État de Tsi, préfet de Lin-tze et prit part aux troubles que suscita
Tien-tchang et entraîna la ruine de trois familles de sa parenté.
6. Twan-mu-tze de Wei, appelé Tze-kong, plus jeune de 31 ans que Kong-tze ; très habile dans l'art de parler et célèbre comme le précédent. Mais le sage, au Tso-tchuen, blâme sa loquacité et ses
paroles acerbes. Il était riche et montait toujours un char à quatre chevaux. Un jour il vint trouver Yuen-hien qui était sur la porte de sa chaumière pauvrement vêtu, mangeant peu, mais joyeux
intérieurement et maître de lui-même.
— Vous avez l'air malade, mon Maître, dit Tze-kong.
Yuen-hien répondit :
— J'ai entendu dire que les gens dépourvus des biens sont appelés pauvres ; ceux qui n'étudient point la sagesse et ne savent point la pratiquer sont appelés malades. Je suis pauvre, oui ! mais
je ne suis point malade.
Tze-kong fut profondément mortifié de cette réponse et, jusqu'à ses derniers jours, rougit de la faute qu'il avait commise en parlant ainsi.
Il fut magistrat de Lou, de Wei et finalement de Tsi. C'est lui qui resta 6 ans près du tombeau du maître.
7. Jan-kieu appelé Tze-yu de la famille de Tchong-kong, plus jeune de 29 ans que Kong-tze, très habile dans les arts et sachant diriger les affaires. Il fut intendant du chef de la famille Ki. En
fonction il procéda en tout avec parfaite justice ; retiré, il étudia les saints. Il était très humble par nature. Quand il eut quitté ses fonctions, Kong-tze dit :
— Il se retire, c'est pourquoi on devrait le promouvoir en dignité.
8. Tchong-yu de Pien (ville de Lou), appelé Tze-lou, plus jeune de 9 ans que le maître, plein de bravoure et d'habileté à diriger les affaires. Droit et sincère, ardent, ferme et rude ; il occupa
une charge à Wei et périt dans une guerre civile comme on l'a vu.
9. Yen-yen de Lou, appelé Tze-yu, plus jeune de 35 ans, habile et instruit ; il étudia spécialement les rites. Entré en charge il fut commandant de Wu-tchang, suivit Kong-tze, passa à Wei où il
fit la connaissance du fils d'un général avec lequel il eut des entretiens moraux et qu'il détermina à fréquenter les leçons de Kong-tze.
10. Pu-shang de Wei, appelé Tze-hia, plus jeune de 44 ans que Kong-tze, renommé pour sa science et ses qualités littéraires, profond connaisseur des rites dont il avait pénétré le sens, d'une
nature généreuse sans égoïsme, aimant à discourir des choses mystérieuses. Retourné à Wei il y étudia les monuments historiques. Par lui le prince de Wei tint une conduite digne d'un saint.
Après la mort de Kong-tze il alla s'établir sur le Ho occidental et y tint école. Wen prince de Wei suivit ses leçons et gouverna sagement. C'est lui prétendument qui aurait fourni la matière au
commentaire de Mao sur le Shi et le Tchun-tsiou à ses commentateurs.
11. Tchun-sun-shi de Tcheu, appelé Tze-tchang, plus jeune de 48 ans que Kong-tze, renommé pour sa noble conduite, de nature gracieuse bien que grave.
— Mon principe de conduite parmi les hommes, disait-il, est avant tout de régler mon extérieur.
Il se distinguait par sa bonté et sa justice ; il préférait céder aux autres que de maintenir ses propres idées. Ses disciples l'aimaient plus qu'ils ne le respectaient.
12. Tseng-tsan de Wou-tchang du Sud, appelé Tze-yu, plus jeune de 40 ans que Kong-tze ; tout appliqué à l'étude du Tao et retenu pour cela, par Kong-tze, à l'étude des Kings.
Le prince de Tsou voulut en faire son ministre, mais il refusa parce que ses parents étaient vieux et avaient besoin de lui ; il ne pouvait supporter l'idée d'être éloigné d'eux. On lui attribue
la composition de nombreux ouvrages et spécialement celle du Ta-tai-li et du Hiao-king. Quant au premier c'est évidemment une erreur.
13. Mie-ming de la famille Tan-tai, plus jeune de 39 ans, appelé Tze-yu ; noble et juste comme un kiun-tze et sans égoïsme. Il occupa une haute fonction à Lou. Kong-tze l'avait d'abord repoussé
parce qu'il était laid et lui paraissait dépourvu de talents. Il se retira plus tard dans le midi et y forma 300 disciples.
14. Kao-tchai appelé Tze-lao, de Tsi, plus jeune de 30 ans ; ardent à l'étude, juste et sincère, ami des règles, mais laid et haut de 5 pieds. Aussi Kong-tze l'estimait peu, dit le Sze-ki. Il fut
préfet de Wou-tchang au pays de Lou.
15. Fou-pou-tchi de Lou, appelé Tze-tsien, préfet de Tan-fou. Plein de talents, de sagesse et d'humanité ; il aimait le peuple et ne supportait pas la tromperie. Le Tso-tchuen lui rend le
témoignage qu'en gouvernant le peuple de Tchen il ne sut jamais tromper personne.
16. Fang-su de Lou, appelé Tze-tchi, occupa une charge dans la famille Ki étant jeune encore. (Voir Tso-tchuen, Gai-kong XIe année).
17. Yeou-ja de Lou, appelé Tze-yeou, ferme, prudent, éclairé, aimant les anciennes doctrines. Après la mort de Kong-tze ses disciples voulurent mettre Tze-yeou à sa place mais Ts'eng leur fit
abandonner ce projet.
18. Kong-Ssi-yi de Lou, appelé Tze hoa, maître des cérémonies pour les hôtes de la cour ; leur enseignait l'étiquette.
19. Yuen-hien de Song, appelé Tze-sze, calme et de cœur pur gardant la juste mesure, pauvre mais joyeux. Il était intendant de Kong-tze quand celui-ci était ministre de la Justice à Lou. Après la
mort du maître il se retira à Wei et y vécut dans l'obscurité.
20. Kong-ye-tchang de Lou, appelé Tze-tchang, d'âme rigoureuse et reconnaissant ses fautes ; épousa la fille de Kong-tze.
21. Nan-kong-Tao de Lou, appelé Tze-yong, d'une sagesse renommée, évitant avec soin toute souillure. Kong-tze le maria à la fille de son frère aîné, Meng-pi.
22. Kong-shi-ko de Tsi, appelé Ki-tze, incapable de s'abaisser ou de flatter pour gagner la faveur. Kong-tze l'avait en grande estime parce qu'il avait préféré vivre pauvre que d'accepter une
charge d'une des familles qui dominaient l'État de Lou par la violence, alors que tant d'autres sollicitaient leurs faveurs.
23. Tseng-tien frère de Teng-shu, appelé Tze-si. Il se distingua par son amour des rites dont il déplorait l'oubli. Cependant on rapporte que pendant les funérailles de Ki-Wou-tze il se tint
appuyé contre la porte et chanta ; ce qui était contraire aux règles. Mais Kong-tze l'estimait et en faisait l'éloge. Un jour il se baigna dans le fleuve et puis se mit à danser en l'honneur du
génie de la pluie pour en obtenir.
24. Yen-wou-yao père de Yen-hoei, appelé Ki-lou, s'attacha à Kong-tze dès le commencement et pratiqua ses leçons. Il alla le trouver au village de Tchue.
25. Shang-keou de Lou, appelé Tze-mou. C'est lui, dit-on, qui transmit le Yi-king au premier d'une série de successeurs qui se le transmirent jusqu'à la restauration des lettres sous les Han.
Mais il n'y a rien là d'historique.
26. Ki-tiao-kai, appelé Tze-jo, natif de Tsai, étudia spécialement le Shu-king et refusa toute fonction malgré les sollicitations de Kong-tze qui l'avait en grande amitié.
27. Kong-liang-ju de Tchen, appelé Tze-tcheng, sage et courageux. Il défendit Kong-tze quand il était attaqué par les gens de Pou et les repoussa. Il suivit partout Kong-tze avec des chars pour
le défendre contre tout acte d'hostilité.
28. Tsing-shang de Lou, appelé Pou. Son père était l'ami du père de Kong-tze et également célèbre par sa vaillance.
29. Yen-ki de Lou, appelé Tze-kiao, servit parfois de cocher au philosophe. Le prince de Wei était un jour dans le même char que la princesse et son fils aîné. Voyant arriver Kong-tze, il lui fit
dire de se mettre à sa suite. Ils traversèrent ainsi le marché. Voyant son maître tout confus, Yen-ki lui dit :
— Pourquoi rougissez-vous ?
— Le Shu-king porte ces mots, répondit Kong-tze : « Voyez ce nouveau couple, j'apaise mon cœur. » Et maintenant, ajouta-t-il en soupirant, je n'ai jamais vu personne qui préférait la vertu au
plaisir.
30. Sze-ma-ki-tcheng de Song, appelé Tze-niu, prompt et hardi de nature et grand parleur. Son frère Huan-tui est noté comme ne possédant qu'un bœuf, misérable, ce qui lui attira la faveur de
Sze-ma-keng. Mais au Lun-yu il est dit qu'il n'avait pas de frère.
31. Wou-ma-shi ou Khi de Tcheou, appelé Tze-khi. C'est à lui que Kong-tze prédit de la pluie en se basant sur un dire du Shi-king.
32. Liang-tchang ou Li, de Tsi, appelé Shou-yu. Il voulait répudier sa femme parce qu'il n'avait pas d'enfant. Shang-tchou l'en dissuada en lui disant que Kong-tze l'avait jadis empêché
d'accomplir le même projet. Liang-tchang écouta ce conseil et 2 ans après il eut un fils.
33. Kiou-mou de Wei appelé Tze-khai ou Tze-tchang. Ayant appris la mort d'un ami, il voulut aller porter ses condoléances. Mais Kong-tze l'arrêta en lui disant que c'était contraire aux
rites.