Évariste HUC (1813-1860)

SOUVENIRS D’UN VOYAGE DANS LA TARTARIE ET LE THIBET

Première édition Adrien Leclère, Paris, 1850, deux volumes. Très nombreuses rééditions, dont : Omnibus, Paris, 2001, 576 pages.

Le départ - La fête des Pains de la lune - Le festin dans une tente mongole - Le toolholos
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Le départ

Le jour n’avait pas encore paru, que nous étions sur pied. Avant de nous mettre en route, nous avions à faire une opération de grande importance ; nous devions changer de costume, et en quelque sorte nous métamorphoser. Les missionnaires qui résident en Chine portent tous, sans exception, les habits des Chinois ; rien ne les distingue des séculiers, des marchands, rien ne leur donne extérieurement le moindre caractère religieux. Il est fâcheux qu’on soit obligé de s’en tenir à ces habits séculiers ; car ils sont un grand obstacle à la prédication de l’Évangile. Parmi les Tartares, un homme noir qui se mêle de parler de religion n’excite que le rire ou le mépris. Un homme noir est censé s’occuper des choses du monde ; les affaires religieuses ne le regardent pas ; elles appartiennent exclusivement aux lamas. Les raisons qui semblent avoir établi et conservé l’usage de l’habit mondain parmi les missionnaires de Chine n’existant plus pour nous, nous crûmes pouvoir nous en dépouiller. Nous pensâmes que le temps était venu de nous donner enfin un extérieur ecclésiastique, et conforme à la sainteté de notre ministère. Les intentions que nous manifesta à ce sujet notre vicaire apostolique dans ses instructions écrites étant conformes à notre désir, nous ne balançâmes point. Nous résolûmes d’adopter le costume séculier des lamas thibétains ; nous disons costume séculier, parce qu’ils en ont un spécialement religieux, dont ils se revêtent quand ils prient dans les pagodes ou assistent à leurs cérémonies idolâtriques. Le costume des lamas thibétains fixa par préférence notre attention, parce qu’il était conforme aux habits que portait le jeune néophyte Samdadchiemba.
Nous annonçâmes aux chrétiens de l’hôtellerie que nous étions décidés à ne plus ressembler à des marchands chinois ; que nous voulions retrancher la queue, et raser entièrement la tête. Cette nouvelle mit en mouvement leur sensiblerie ; il y en eut qui parurent verser des larmes ; quelques uns même cherchèrent par leurs discours à nous faire changer de résolution : mais leurs pathétiques paroles ne firent que glisser sur nos cœurs ; un rasoir, que nous prîmes dans un petit paquet, fut la réponse que nous donnâmes à leur argumentation. Nous le mîmes entre les mains de Samdadchiemba, et il suffit d’un instant pour faire tomber la longue tresse de cheveux que nous laissions croître depuis notre départ de France. Nous revêtîmes une grande robe jaune, qui s’ajustait sur le côté droit par cinq boutons dorés ; elle était serrée aux reins par une longue ceinture rouge ; par dessus cette robe nous passâmes un gilet rouge, terminé à sa partie supérieure par un petit collet de velours violet ; un bonnet jaune surmonté d’une pommette rouge complétait notre nouveau costume.

Le déjeuner suivit cette opération décisive ; mais il fut morne et silencieux. Quand l’intendant de la caisse apporta les petits verres et l’urne où fumait le vin chaud des Chinois, nous lui déclarâmes qu’ayant changé d’habit, nous devions aussi modifier nos habitudes de vivre. « Emporte, lui dîmes nous, ce vin et ce réchaud ; dès aujourd’hui nous renonçons au vin et à la pipe. Tu sais, ajoutâmes nous en riant, que les bons lamas s’abstiennent de fumer et de boire du vin. » Les chrétiens chinois dont nous étions entourés ne riaient pas, eux ; ils nous regardaient sans rien dire, et d’un œil de commisération : car ils étaient persuadés au fond du cœur, que nous mourrions de privations et de misère dans les déserts de la Tartarie. Quand le déjeuner fut fini, pendant que les gens de l’auberge pliaient la tente, sellaient les chameaux et organisaient le départ, nous prîmes quelques petits pains cuits à la vapeur d’eau, et nous allâmes cueillir le dessert sur des groseilliers sauvages, le long du ruisseau voisin. Bientôt on vint nous avertir que tout était prêt. Nous enfourchâmes nos montures, et nous prîmes la route de Tolon noor, accompagnés de notre seul Samdadchiemba.


La fête des Pains de la lune

Nous arrivâmes à Chaborté le quinzième jour de la huitième lune, époque de grandes réjouissances pour les Chinois. Cette fête, connue sous le nom de Yué ping (Pains de la lune), remonte à la plus haute antiquité. Elle a été établie pour honorer la lune d’un culte superstitieux. En ce jour de solennité, les travaux sont suspendus ; les ouvriers reçoivent de leurs maîtres une gratification pécuniaire ; chacun se revêt de ses beaux habits, et bientôt la joie éclate dans toutes les familles, au milieu des jeux et des festins. Les parents et les amis s’envoient mutuellement des gâteaux de diverses grosseurs, où est gravée l’image de la lune, c’est à dire un petit bosquet au milieu duquel est un lièvre accroupi.

Depuis le XIVe siècle, cette fête a pris un caractère politique peu connu des Mongols, mais que la tradition a fidèlement conservé parmi les Chinois. Vers l’an 1368, les Chinois songèrent à secouer le joug de la dynastie tartare fondée par Tchinggis khan, et qui gouvernait l’empire depuis près de cent ans. Une vaste conjuration fut ourdie dans toutes les provinces ; elle devait éclater sur tous les points, le quinzième jour de la huitième lune, par le massacre des soldats mongols, établis dans chaque famille chinoise pour maintenir la conquête. Le signal fut donné de toutes parts, par un billet caché dans les gâteaux de la lune, qu’on avait coutume de s’envoyer mutuellement à pareille époque. Aussitôt les massacres commencèrent, et l’armée tartare, qui était disséminée dans toutes les maisons de l’empire, fut complètement anéantie. Cette catastrophe mit fin à la domination mongole ; et maintenant les Chinois, en célébrant la fête du Yué ping, se préoccupent moins des p.067 superstitions de la lune, que de l’événement tragique auquel ils durent le recouvrement de leur indépendance nationale.

Les Mongols semblent avoir entièrement perdu le souvenir de cette sanglante révolution ; car tous les ans ils font, comme les Chinois, la fête des Pains de la lune, et célèbrent ainsi, sans le savoir, le triomphe que leurs ennemis remportèrent autrefois sur leurs ancêtres.

A une portée de fusil de l’endroit où nous avions campé, on voyait s’élever plusieurs tentes mongoles, dont la grandeur et la propreté témoignaient de l’aisance de leurs habitants. Cette opinion était d’ailleurs confirmée par des troupeaux immenses de bœufs, de moutons et de chevaux, qui paissaient aux environs. Pendant que nous récitions le bréviaire dans l’intérieur de notre tente, Samdadchiemba alla rendre visite à ces Mongols. Bientôt près, nous vîmes venir vers nous un vieillard à grande barbe blanche, et dont les traits de la figure annonçaient un personnage distingué. Il était accompagné d’un jeune lama et d’un enfant qu’il tenait par la main.

— Seigneurs lamas, nous dit le vieillard, tous les hommes sont frères ; mais ceux qui habitent sous la tente sont unis entre eux comme la chair et les os. Seigneurs lamas, venez vous asseoir dans ma pauvre demeure. Le quinze de la lune est une époque solennelle ; vous êtes voyageurs et étrangers, vous ne pourrez pas ce soir occuper votre place au foyer de votre noble famille. Venez vous reposer quelques jours parmi nous ; votre présence nous amènera la paix et le bonheur...

Nous dîmes à ce bon vieillard que nous ne pouvions accepter entièrement son offre, mais que dans la soirée, après avoir récité nos prières, nous irions prendre le thé chez lui, et causer un instant de la nation mongole. Ce vénérable Tartare s’en retourna ; mais bientôt après le jeune lama qui l’avait accompagné reparut, en nous disant que nous étions attendus. Nous pensâmes que nous ne pouvions pas nous dispenser de répondre à une invitation si pleine de cordialité et de franchise. Après avoir donc recommandé au Dchiahour de veiller avec soin sur notre demeure, nous suivîmes le jeune lama qui était venu nous chercher.


Festin dans une tente mongole

En entrant dans la tente mongole, nous fûmes étonnés d’y trouver une propreté à laquelle on est peu accoutumé en Tartarie. Au centre il n’y avait pas de foyer ; l’œil n’apercevait nulle part ces grossiers instruments de cuisine, qui encombrent ordinairement les habitations tartares. Il était aisé de voir que tout avait été arrangé et disposé pour une fête. Nous nous assîmes sur un grand tapis rouge, et bientôt on apporta, de la tente voisine qui servait de cuisine, du thé au lait, avec des petits pains frits dans du beurre, des fromages, des raisins secs et des jujubes.

Après avoir fait connaissance avec la nombreuse société mongole, au milieu de laquelle nous nous trouvions, la conversation s’engagea insensiblement sur la fête des Pains de la lune.

— Dans notre pays d’Occident, leur dîmes nous, on ne connaît pas cette fête des Pains de la lune ; on n’adore que Jéhovah, créateur du ciel, de la terre, du soleil, de la lune et de tout ce qui existe.

— O la sainte doctrine ! s’écria le vieillard, en portant au front ses deux mains jointes. Les Tartares, non plus, n’adorent pas la lune ; ils ont vu les Chinois célébrer cette fête, et ils en suivent l’usage sans trop savoir pourquoi.

— Oui, répondîmes nous, vous suivez cet usage, et vous ne savez pas pourquoi ! Cette parole est pleine de sens. Voici ce que nous avons entendu dire dans le pays des Kitat.

Et alors nous racontâmes, dans cette tente mongole, ce que nous savions de l’épouvantable journée des Yué ping. A notre récit, ces figures tartares étaient remplies d’étonnement et de stupéfaction. Les jeunes gens parlaient entre eux à voix basse ; mais le vieillard gardait un morne silence ; il avait baissé la tête, pour cacher de grosses larmes qui coulaient de ses yeux.

— Frère enrichi d’années, lui dîmes nous, ce récit ne paraît pas te surprendre ; mais il a rempli ton cœur d’émotion.

— Saints personnages, dit le vieillard après avoir relevé sa tête et essuyé ses yeux du revers de sa main, cet événement terrible, qui cause un si grand étonnement à cette jeunesse, ne m’est pas inconnu ; mais je voudrais ne l’avoir jamais appris, et je repousse toujours son souvenir ; car il fait monter la rougeur au front de tout Tartare dont le cœur n’a pas encore été vendu à la nation des Kitat. Un jour, que nos grands lamas connaissent, doit venir, et le sang de nos pères si indignement assassinés sera enfin vengé. Quand l’homme saint qui doit nous commander sera apparu, chacun de nous se lèvera, et nous marcherons tous à sa suite. Alors nous irons, à la face du soleil, demander aux Kitat compte du sang tartare qu’ils ont répandu dans les ténèbres de leurs maisons. Les Mongols célèbrent chaque année cette fête ; le plus grand nombre n’y voient qu’une cérémonie indifférente ; mais les Pains de la lune réveillent toujours dans le cœur de quelques uns le souvenir de la perfidie dont nous avons été victimes et l’espérance d’une juste vengeance.

Après un instant de silence, le vieillard ajouta :

— Saints personnages, quoi qu’il en soit, ce jour est véritablement un jour de fête, puisque vous avez daigné descendre dans notre pauvre habitation. Il n’est pas bien d’occuper nos cœurs de tristes pensées... Enfant, dit il à un jeune homme qui était assis sur le seuil de la porte, si le mouton a suffisamment bouilli, emporte les laitages.

Pendant que celui-ci déblayait l’intérieur de la tente, le fils aîné de la famille entra, portant de ses deux mains une petite table oblongue sur laquelle s’élevait un mouton coupé en quatre quartiers, entassés les uns sur les autres. Aussitôt que la table fut placée au milieu des convives, le chef de famille, s’armant du couteau qui était suspendu à sa ceinture, coupa la queue du mouton, la partagea en deux, et nous en offrit à chacun une moitié.

Parmi les Tartares, la queue est regardée comme la partie la plus exquise du mouton, et par conséquent la plus honorable. Les queues des moutons tartares sont d’une forme et d’une grosseur remarquables ; elles sont larges, ovales et épaisses ; le poids de la graisse qui les entoure varie de six à huit livres, suivant la grosseur du mouton.

Après que le chef de famille nous eut donc fait hommage de cette grasse et succulente queue de mouton, voilà que tous les convives, armés de leur couteau, se mettent à dépecer, à l’envi, ces formidables quartiers de bouilli ; bien entendu que dans ce festin tartare on ne trouvait ni assiettes ni fourchettes ; chacun était obligé de placer sur ses genoux sa tranche de mouton et de la déchirer sans façon de ses deux mains, sauf à essuyer de temps en temps, sur le devant du gilet, la graisse qui ruisselait de toute part. Pour nous, bien grand fut d’abord notre embarras. En nous offrant cette blanche queue de mouton, on avait été animé, sans contredit, des meilleures intentions du monde ; mais nous n’étions pas encore assez sevrés de nos préjugés européens, pour oser attaquer, sans pain et sans sel, ces morceaux de graisse qui tremblaient et pantelaient en quelque sorte entre nos doigts. Nous délibérâmes donc entre nous deux, et dans notre langue maternelle, sur le parti que nous avions à prendre en cette fâcheuse circonstance. Remettre furtivement nos larges tranches de lard sur la table nous paraissait une grave imprudence ; parler franchement à notre amphitryon et lui faire part de notre répugnance pour leur mets favori, était chose impossible et contraire à l’étiquette tartare. Nous nous arrêtâmes donc au parti suivant. Nous coupâmes cette malencontreuse queue de mouton par petites tranches que nous offrîmes à chacun des convives, en les priant de vouloir bien partager, en ce jour de fête, notre rare et précieux régal. D’abord nous eûmes à lutter contre des refus pleins de dévouement ; mais enfin on nous débarrassa à la ronde de ce mets immangeable, et il nous fut permis d’attaquer un gigot, dont la saveur était plus conforme aux souvenirs de notre première éducation.

Après que ce repas homérique fut achevé, et qu’il ne restait plus au milieu de la tente qu’un monstrueux entassement d’os de mouton bien blancs et bien polis, un enfant alla détacher un violon à trois cordes, suspendu à une corne de bouc, et le présenta au chef de famille. Celui-ci le fit passer à un jeune homme qui baissait modestement la tête, mais dont les yeux s’animèrent tout à coup aussitôt qu’il eut entre les mains le violon mongol.

— Nobles et saints voyageurs, nous dit le chef de famille, j’ai invité un toolholos pour embellir cette soirée de quelques récits.


Le toolholos

Pendant que le vieillard nous adressait ces mots, le chanteur préludait déjà en promenant ses doigts sur les cordes de son instrument. Bientôt il se mit à chanter d’une voix forte et accentuée ; quelquefois il s’arrêtait, et entremêlait son chant de récits animés et pleins de feu. On voyait toutes ces figures tartares se pencher vers le chanteur, et accompagner des mouvements de leur physionomie le sens des paroles. Le toolholos chantait des sujets nationaux et dramatiques, qui excitaient vivement l’intérêt de ceux qui l’écoutaient. Pour nous, peu initiés que nous étions à l’histoire de la Tartarie, nous prenions un assez mince intérêt à tous ces personnages inconnus que le rapsode mongol faisait passer tour à tour sur la scène.
Il avait déjà chanté quelque temps, lorsque le vieillard lui présenta une grande tasse de vin de lait. Le chanteur posa aussitôt le violon sur ses genoux, et se hâta d’humecter avec cette liqueur mongole son gosier desséché par tant de merveilles qu’il venait de raconter. Quand il eut achevé de boire, et pendant qu’il nettoyait de sa langue les bords encore humides de sa coupe.

— Toolholos, lui dîmes nous, dans les chants que tu viens de faire entendre tout était beau et admirable. Cependant tu n’as encore rien dit de l’immortel Tamerlan : l’invocation à Timour est un chant fameux, et chéri des Mongols.

— Oui, oui, s’écrièrent plusieurs voix à la fois, chante nous l’invocation à Timour.

Il se fit un instant de silence, et le toolholos ayant recueilli ses souvenirs, chanta sur un ton vigoureux et guerrier les strophes suivantes.

Quand le divin Timour habitait sous nos tentes, la nation mongole était redoutable et guerrière ; ses mouvements faisaient pencher la terre ; d’un regard elle glaçait d’effroi les dix mille peuples que le soleil éclaire.
O divin Timour, ta grande âme renaîtra-t-elle bientôt ? Reviens, reviens, nous t’attendons, ô Timour !

Nous vivons dans nos vastes prairies, tranquilles et doux comme des agneaux ; cependant notre cœur bouillonne, il est encore plein de feu. Le souvenir des glorieux temps de Timour nous poursuit sans cesse. Où est le chef qui doit se mettre à notre tête, et nous rendre guerriers?
O divin Timour, ta grande âme renaîtra-t-elle bientôt ? Reviens, reviens, nous t’attendons, ô Timour !

Le jeune Mongol a le bras assez vigoureux pour dompter l’étalon sauvage ; il sait découvrir au loin, sur les herbes, les vestiges du chameau errant... Hélas ! il n’a plus de force pour bander l’arc des ancêtres ; ses yeux ne peuvent apercevoir les ruses de l’ennemi.
O divin Timour, ta grande âme renaîtra-t-elle bientôt ? Reviens, reviens, nous t’attendons, ô Timour !

Nous avons aperçu, sur la colline sainte, flotter la rouge écharpe du lama, et l’espérance a fleuri dans nos tentes... Dis le nous, ô lama ! Quand la prière est sur tes lèvres, Hormoustha te dévoile-t-il quelque chose des vies futures ?
O divin Timour, ta grande âme renaîtra-t-elle bientôt ? Reviens, reviens, nous t’attendons, ô Timour !

Nous avons brûlé le bois odorant aux pieds du divin Timour ; le front courbé vers la terre, nous lui avons offert la verte feuille du thé et les laitages de nos troupeaux... Nous sommes prêts ; les Mongols sont debout, ô Timour !... Et toi, lama, fais descendre le bonheur sur nos flèches et sur nos lances.
O divin Timour, ta grande âme renaîtra-t-elle bientôt ? Reviens, reviens, nous t’attendons, ô Timour !

Quand le troubadour tartare eut achevé ce chant national, il se leva, nous fit une profonde inclination, et, après avoir suspendu son instrument de musique à une cheville de bois fixée aux parois de la tente, il sortit.

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